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La chercheuse Natalie Phillips de Concordia examine le lien entre l’acuité sensorielle et la cognition durant le vieillissement

Les facteurs sociaux n’expliquent pas leur relation, selon une nouvelle étude
28 janvier 2020
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« Nous cherchions à expliquer l’existence de cette relation entre nos capacités sensorielles et cognitives », affirme Natalie Phillips.
« Nous cherchions à expliquer l’existence de cette relation entre nos capacités sensorielles et cognitives », affirme Natalie Phillips.

Il existe un lien largement reconnu depuis longtemps entre le déclin de l’acuité sensorielle – particulièrement l’ouïe et la vision – et la cognition. Les données de l’Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement, menée auprès de dizaines de milliers de participants âgés de 45 à 85 ans dans tout le pays, appuient d’ailleurs ce constat.

Pilotée par des chercheurs montréalais, une récente étude s’est interrogée sur le pourquoi de cette relation. Natalie Phillips, de l’Université Concordia, et ses collègues ont notamment déterminé qu’une mauvaise ouïe était liée à un déclin de la mémoire et de la fonction exécutive chez des personnes âgées par ailleurs relativement en santé, autonomes et membres d’une communauté.

Leur article, publié dans la revue Scientific Reports, abordait également le rôle de facteurs sociaux tels que la solitude ou la dépression dans le déclin cognitif.

« Nous tenions à étudier des personnes dont le réseau social était plus restreint et qui recevaient moins de soutien social, explique Natalie Phillips, professeure de psychologie à la Faculté des arts et des sciences, et coauteure de l’article. Les personnes dont le cerveau est moins stimulé et dont la vie sociale est moins riche voient-elles leur cognition s’affaiblir? »

Selon la Pre Phillips, l’équipe n’a trouvé aucune preuve concluante à cet égard.

« À ce stade, tout ce que nous pouvons affirmer est que les personnes aux capacités sensorielles amoindries présentent un déclin de leurs facultés cognitives, ce qui ne s’explique pas par les limites de leur réseau social ou de leur fonctionnement social. »

L’équipe de recherche comprenait Natalie Phillips, Walter Wittich, de l’Université de Montréal, Kathleen Pichora-Fuller, de l’Université de Toronto, et Paul Mick, de l’Université de la Saskatchewan. L’auteure principale de l’étude, Anni Hämäläinen, était une boursière postdoctorale collaborant avec l’équipe.

Le pourquoi…

Les auteurs ont examiné les données colligées par l’Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement entre 2012 et 2015. Aucun des répondants ne vivait dans un établissement ou ne souffrait de quelque trouble cognitif que ce soit. Les chercheurs ont également tenu compte d’autres facteurs tels que l’âge, le genre, l’éducation et l’état de santé. Ils ont ainsi découvert que le lien entre l’acuité sensorielle et la fonction cognitive demeurait fort dans toutes les circonstances.

« Nous cherchions à expliquer l’existence de cette relation entre nos capacités sensorielles et cognitives », affirme Natalie Phillips.

Celle-ci énumère quatre hypothèses. La première est une cause courante de détérioration : à mesure qu’une personne vieillit, sa cognition se dégrade simplement, tout comme son ouïe et sa vision.

Selon la deuxième hypothèse, un problème sensoriel signifie que le cerveau reçoit une information de mauvaise qualité. À long terme, celle-ci entraîne un mauvais fonctionnement cognitif.

Une troisième idée concerne la dépense des ressources. Si le cerveau dépense beaucoup d’énergie à tenter de comprendre ce qui est dit ou montré, il restera relativement peu de ressources pour le traitement cognitif de cette information.

Les chercheurs n’ont pas pu tester les trois premières hypothèses, car ils avaient besoin de données de base de suivi longitudinal aux fins de comparaison avec leurs résultats de base. Ils ont toutefois pu vérifier la quatrième hypothèse, qui examinait le lien établi entre le déclin sensoriel et les conséquences sociales négatives comme le potentiel de dépression ainsi que de retrait et d’isolement sociaux accrus.

« Il devient difficile de naviguer dans son monde, de s’adonner à des activités sociales ou d’entretenir des conversations, explique la Pre Phillips. Nous voulions donc savoir si la relation entre la fonction sensorielle et la cognition d’une personne dépendait des limites de son réseau social. » En fin de compte, les chercheurs ont découvert que ce n’était pas le cas.

…et le pourquoi pas

Natalie Phillips et ses collègues soulignent que l’examen des données de l’Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement ne fait que commencer. Après tout, il s’agit de la première vague de données provenant d’une étude qui s’étendra sur 20 ans. Il reste donc beaucoup à apprendre.

Par exemple, l’équipe a déterminé qu’une mauvaise ouïe présageait une mauvaise fonction exécutive, même si la majorité des tests étaient de nature visuelle. « Nous constatons ce lien entre la faiblesse de l’ouïe et la cognition, quel que soit le mode de transmission de l’information cognitive », précise la chercheuse.

La Pre Phillips ajoute que son équipe continuera d’examiner les données de l’étude canadienne à l’avenir.

« Nous entendons accéder aux données génétiques disponibles pour déterminer si un profil génétique particulier domine la relation entre le sensoriel et le cognitif. »

L’étude a été financée par le Consortium canadien en neurodégénérescence associée au vieillissement, les Instituts de recherche en santé du Canada et le Réseau québécois de recherche sur le vieillissement.


Consultez l’étude citée : « 
Sensory-cognitive associations are only weakly mediated or moderated by social factors in the Canadian Longitudinal Study on Aging ».

 



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