Reconnaissance territoriale
J’aimerais / Nous aimerions commencer par reconnaître que l'Université Concordia est située en territoire autochtone, lequel n’a jamais été cédé. Je reconnais/Nous reconnaissons la nation Kanien'kehá: ka comme gardienne des terres et des eaux sur lesquelles nous nous réunissons aujourd'hui. Tiohtiá:ke / Montréal est historiquement connu comme un lieu de rassemblement pour de nombreuses Premières Nations, et aujourd'hui, une population autochtone diversifiée, ainsi que d'autres peuples, y résident. C’est dans le respect des liens avec le passé, le présent et l'avenir que nous reconnaissons les relations continues entre les Peuples Autochtones et autres personnes de la communauté montréalaise.
Prononciation
Wahéhshon Shiann Whitebean a préparé une ressource complète qui fournit des explications détaillées sur l'historique de l’énoncé de reconnaissance territoriale, la justification de la présente formulation, ainsi que des réponses à un certain nombre de questions fréquemment posées sur la reconnaissance territoriale. Lisez-en plus ci-dessous ou téléchargez-le en format PDF.
Depuis sa fondation, Concordia entretient des relations suivies avec les membres des peuples autochtones et des autres communautés qui se côtoient sur l’île de Tiohtiá:ke, c’est-à-dire Montréal, et dans ses environs. À l’Université, le groupe directeur sur les directions autochtones conçoit actuellement une section du site Web du carrefour autochtone qui sera consacrée à ce pan de notre histoire. Son contenu décrira et célébrera bon nombre d'occasions et expériences de collaboration que nous avons partagées. Vous trouverez ci-après un bref historique de l’énoncé de reconnaissance territoriale ainsi que des précisions sur cette initiative que nous espérons voir prospérer.
Sous ses diverses formes, l’énoncé de reconnaissance territoriale – de même que les pratiques et les actions mises en œuvre par la communauté de Concordia – favorise des relations significatives et respectueuses entre membres de la communauté autochtone, gardiens du savoir et autres partenaires et collaborateurs. Dans sa formulation actuelle, le texte repose sur ces prémisses. De nombreux membres du corps professoral, du personnel et de l’effectif étudiant de Concordia, sans oublier plusieurs partenaires communautaires, ont contribué à la discussion sur l’énoncé de reconnaissance territoriale, ainsi qu’à la rédaction et à la justification de son contenu. Il émane donc des efforts cumulés d’érudits issus d’horizons variés. Pour la suite des choses, nous entendons entretenir un dialogue ouvert avec l’ensemble des intervenants.
(Le comment et le pourquoi du libellé de l’énoncé de reconnaissance territoriale, et ce, par segments.)
La présente version de l’énoncé de reconnaissance territoriale a été principalement rédigée par Wahéhshon Shiann Whitebean et Karl S. Hele, Ph. D. Un apport considérable a également été fourni aux étapes finales du processus par Louellyn White, Ph. D. Accepté à l’unanimité, le texte final a été soumis au groupe directeur sur les directions autochtones le 16 février 2017.
Les débats et les discussions sur les variantes de ce segment ont notamment porté sur l’opportunité de désigner nommément certaines collectivités des Premières Nations et des communautés autochtones qui trouvent leurs racines sur l’île de Montréal et dans les environs. Depuis des temps immémoriaux, de nombreuses Premières Nations revendiquent ce lieu, voies d’eau y comprises, comme la patrie, le territoire traditionnel ou la terre d’origine de leur peuple. Parmi celles-ci figurent les Kanien’kehá:kas (ou Mohawks) de la Confédération de Haudenosaunis, de même que les Hurons (ou Wendats), les Abénaquis et les Anishinaabes (ou Algonquins). Il ne nous appartient pas de rendre une décision sur cette revendication. Nous désirons plutôt reconnaître et soutenir l’ensemble des peuples et nations autochtones qui considéraient – et considèrent toujours – ces terres et ces eaux comme un lieu d’appartenance exclusif. Si nous avons conservé l’expression « non cédé », c’est qu’il n’existe aucune entente, aucun traité, entre une nation autochtone, quelle qu’elle soit, et les colonisateurs sur la transmission d’un éventuel titre de propriété ou sur le contrôle d’un territoire donné. Autrement dit, la terre a été occupée sans permission. Par ailleurs, nous voulons montrer, d’une part, que nous sommes conscients des injustices dont est parsemée l’histoire coloniale de ce lieu et, d’autre part, que Concordia affiche haut et fort son soutien et sa solidarité envers les membres autochtones de notre communauté.
De nombreux peuples, communautés et nations autochtones ont contribué à la fondation de Tiohtiá:ke. Toutefois, il est entendu et communément soutenu que la nation Kanien’kehá:ka manifeste une forte présence historique et ininterrompue sur ce territoire, plus précisément dans deux communautés voisines de Montréal : Kahnawà:ke et Kanehsatá:ke. Ce segment de l’énoncé tient également compte de la tradition (ou histoire) orale relative à l’île que les Kanien’kehá:kas se sont transmise de génération en génération. Nous devons reconnaître le rôle qu’ont joué ces derniers dans la protection et la préservation des terres et des eaux dont nous jouissons mutuellement aujourd’hui. Leur intendance peut servir de modèle au respect collectif que nous devons au milieu naturel et à la communauté où nous vivons, et ce, dans leur globalité.
L’emploi du toponyme « Tiohtiá:ke » célèbre la présence tant historique qu’actuelle de deux communautés kanien’kehá:kas. Il s’agit d’une forme abrégée de « Teionihtiohtiá:kon », terme qui signifie approximativement « là où le groupe se scinde ou emprunte des chemins différents ». Par la force des choses, cet endroit « où le groupe s’est scindé ou a emprunté des chemins différents » est devenu un point d’arrêt obligé pour les voyageurs des Premières Nations. Servant depuis toujours de lieu de rassemblement, la région s’est naturellement muée en site incontournable pour les relations diplomatiques ainsi que les échanges culturels, linguistiques et commerciaux. Outre sa centralité, le rayonnement de Tiohtiá:ke (ou Montréal) a attiré les premiers colonisateurs de l’île. Négocié et ratifié en 1701, le traité de la Grande Paix montre toute l’importance que revêtait l’endroit pour les membres des Premières Nations comme pour les colonisateurs. Rappelons que cette entente mettait fin à une série de conflits destructeurs qui opposaient plusieurs Premières Nations.
Nous jugions essentiel d’inclure dans la communauté non seulement ses membres autochtones, urbains et dynamiques, mais également les nombreuses personnes venues de tous les horizons pour y vivre.
Ce passage reflète en quelque sorte la communion de pensée qui nous anime. En effet, il entrelace le passé, le présent et l’avenir de l’ensemble de la communauté montréalaise, laquelle repose sur des assises autochtones. Par ailleurs, il rappelle à toute personne qui n’est pas originaire de l’endroit que l’histoire, ou le passé, est l’instrument de notre existence collective ici; que les peuples et les communautés autochtones y sont toujours présents et qu’ils sont essentiels à notre prospérité commune; et que nous devons tous nous engager et nous investir dans un but collectif : aller de l’avant, ensemble.
Au printemps 2017, les célébrations de remise des diplômes incluaient la lecture de l’énoncé de reconnaissance territoriale. Effectuée publiquement par un membre de la haute direction de Concordia, cette lecture avait lieu au début de chaque gala. Le groupe directeur sur les directions autochtones continue de collaborer avec les membres de la direction de Concordia et des différents comités de planification des collations des grades, et ce, en vue de modifier et d’adapter les futures cérémonies de sorte qu’elles intègrent et promeuvent les identités, cultures et langues autochtones. Le groupe vise à créer un milieu ouvert et inclusif pour tous les membres de l’effectif étudiant, du personnel, du corps professoral et de la communauté élargie de l’Université. De plus, Concordia appuie le choix de toute personne autochtone de revêtir une tenue cérémonielle ou un costume culturel à une collation des grades, que ce soit en remplacement de la toge et du mortier traditionnels ou en ajout à ceux-ci.
À l’échelle locale, Concordia s’engage à favoriser la poursuite d’un dialogue mutuellement fructueux et respectueux avec les membres des communautés et peuples autochtones. Du reste, bon nombre étudient, travaillent ou enseignent à l’Université. Par l’adoption d’un énoncé de reconnaissance territoriale, Concordia convient que les Autochtones sont liés depuis fort longtemps aux terres – eaux y comprises – où nous nous rassemblons aujourd’hui et que celles-ci abritent leur foyer et forment leur territoire. La création de cet espace de dialogue, d’échange et de développement de la conscience communautaire s’inscrit dans le véritable esprit de Tiohtiá:ke (ou Montréal). De fait, elle puise dans les racines profondes et le riche passé d’un lieu voué à la diversité, aux relations diplomatiques et à d’importantes activités économiques. Enfin, elle nous permet d’endosser notre rôle au sein du territoire, soit celui de gardien de la prospérité à long terme d’une communauté diversifiée et de la pérennité des terres et des eaux, et ce, au profit des générations futures.
En règle générale, il convient de prononcer l’énoncé de reconnaissance territoriale au début de toute manifestation, rencontre ou réunion qui se déroule à Concordia ou qui est parrainée par celle-ci à l’intérieur du territoire visé. La lecture de l’énoncé au début d’un événement vise à situer non seulement celui-ci, mais aussi ses participants. Par ailleurs, l’énoncé de reconnaissance territoriale constitue un moyen de réaffirmer le type de liens que nous établissons – à titre institutionnel, collectif ou individuel – à l’égard dudit lieu et des gardiens de ses terres et eaux. Par conséquent, l’intention que sous-tend l’énoncé doit s’exprimer consciemment.
Remarque : Dans un effort pour favoriser des relations harmonieuses avec les Autochtones d’un océan à l’autre, il convient de prononcer un énoncé de reconnaissance territoriale analogue à celui-ci chaque fois que vous vous trouvez sur les terres d’une autre nation ou d’un autre peuple autochtones. Ainsi, quand vous animez un événement qui se déroule sur un territoire situé hors de Concordia et de l’agglomération montréalaise, ou que vous y participez, vous témoignez du respect envers les membres du peuple ou de la communauté autochtones de l’endroit. Autrement dit, la reconnaissance d’un peuple, d’un territoire ou d’un lieu ne doit pas se limiter aux campus de Concordia ou à la région de Montréal.
Tout un chacun peut prononcer ou lire à haute voix l’énoncé de reconnaissance territoriale; cette intervention n’est pas réservée aux Autochtones. En fait, l’énoncé est conçu pour aider les personnes ne s’identifiant pas aux Autochtones à se situer dans un territoire ou un lieu autochtones. Il vise également à remémorer à tous une histoire millénaire souvent oubliée ou négligée.
Bien sûr! Quand vous reproduisez l’énoncé de reconnaissance territoriale, veuillez simplement indiquer la date de son adoption – le 16 février 2017 – de même que sa provenance, c’est-à-dire le groupe directeur sur les directions autochtones. Ainsi, toute question ou observation sera dirigée vers la personne ou l’unité appropriées à Concordia. Du reste, l’énoncé de reconnaissance territoriale constitue une bonne amorce à une discussion approfondie sur nos liens avec les gardiens des terres et eaux formant notre habitat. Vous pourrez fort à propos lancer une telle conversation dans une salle de classe ou lors d’un événement, quel qu’il soit. Voyez-y une occasion pédagogique de nous familiariser davantage avec l’histoire, la culture et la politique, et de poser un regard critique sur notre rapport – à titre institutionnel ou individuel – avec Tiohtiá:ke (ou Montréal) et sa population des plus diversifiées.
Pas du tout! De nombreuses formules permettent de reconnaître convenablement un territoire autochtone ainsi que les peuples et communautés qui y vivent. Tout comme s’enrichissent au fil du temps votre savoir, votre expérience et vos relations, nous perfectionnerons notre mode de reconnaissance de la communauté autochtone de Tiohtiá:ke (ou Montréal) et nos méthodes de collaboration avec ses membres. Pour vous aider à partir du bon pied, nous avons défini à votre intention des principes directeurs de la mise en œuvre ou de la rédaction d’un énoncé de reconnaissance territoriale; vous les trouverez ci-après.
Les peuples et communautés autochtones possèdent diverses formes de savoirs et de protocoles culturels qui les guident dans les processus de récognition mutuelle et de reconnaissance d’un territoire où ils passent ou séjournent. Il y a une différence entre être autochtone dans une région aussi vaste que l’Île de la Tortue (ou Amérique du Nord) et faire partie d’une communauté, d’une nation ou d’un territoire spécifiques qui ont des racines ancestrales et des liens avec un lieu précis. Le cas échéant, la formule de salutation ou de bienvenue peut adopter diverses formes, dont les suivantes.
a) Lorsqu’il se rend sur le territoire traditionnel d’une nation, d’une communauté ou d’un peuple autochtones dont il ne fait pas partie, le visiteur autochtone puise dans ses propres savoirs et protocoles culturels pour reconnaître – du mieux qu’il peut – la collectivité locale. Par exemple, il fait référence aux liens ou à l’histoire qui unissent sa communauté à celle-ci, ou encore il se reporte à des expériences personnelles.
b) Le visiteur apporte une offrande ou un cadeau : tabac, produits médicinaux, nourriture, graines, effets personnels, mots ou chants.
c) En guise de salutation, le visiteur dit : Ohén:ton Karihwatehkwen [« les questions ou les enjeux priment (tout le reste) »]. Cette formule est parfois appelée « action de grâce » ou « communion des esprits ». C’est par elle que les Kanien’kehá:kas (ou membres du peuple de l’emplacement du silex, ou Mohawks) inaugurent officiellement un rassemblement, quel qu’il soit. Le contenu et la durée de l’allocution varient au gré de l’orateur. Habituellement prononcée en kanien’kehá:ka (ou langue mohawk), la salutation s’accompagne parfois d’une cérémonie de fumigation de tabac.
Oui, vous pouvez faire les deux. Toutefois, il est préférable de donner préséance à l’aîné ou au membre de la communauté qui a accepté d’inaugurer l’événement. Le cas échéant, demandez à l’intéressé comment il souhaite être présenté. De même, voyez s’il consent à ce que la lecture d’un énoncé de reconnaissance territoriale s’ajoute à sa salutation ou à son mot de bienvenue. Quand des Autochtones de divers endroits participent à un événement, le représentant du territoire autochtone local a préséance. Respectez la façon de procéder que privilégie ce dernier. Si, pour une raison ou pour une autre, vous devez choisir entre l’adresse d’une formule de salutation et la lecture d’un énoncé de reconnaissance territoriale, optez pour la salutation. En effet, elle revêt plus d’importance pour la communauté et son territoire. Par ailleurs, nous préparons actuellement un document exhaustif qui explique les protocoles appropriés à respecter en situation de travail avec des membres de peuples et de communautés autochtones.