Coopération insuffisante, réglementation fragile
L’équipe de recherche souligne que la réglementation existante entourant les cargaisons de porte-conteneurs est plus permissive que dans d’autres secteurs, tout comme la surveillance. Comme l’explique M. Wan, il y a peu de supervision internationale de la pollution marine en dehors des eaux territoriales, et la liste des substances nocives établie par MARPOL, la convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires, a cruellement besoin d’une mise à jour.
Pire encore, la quantité substantielle de conteneurs maritimes rend leur inspection individuelle incroyablement difficile, ce qui permet aux transporteurs de modifier l’étiquetage des conteneurs en toute impunité. L’équipe de recherche présente les résultats d’un programme d’inspections de 2008, indiquant des irrégularités dans 34 pour cent des unités inspectées.
Ce manque de rigueur ne pose pas seulement des risques de sécurité, il nuit à la validité des recherches scientifiques qui se penchent sur le problème. Le manque de données rend l’adoption de nouveaux règlements encore plus difficile. « Cela crée un cercle vicieux dans lequel les choses ne font qu’empirer », affirme M. Wan.
Du bateau à votre assiette
Le contraste important entre le domaine peu étudié de la pollution causée par les conteneurs et le domaine plus mûr de la prévention et du nettoyage des déversements de pétrole est souligné par Chunjiang An, qui est professeur agrégé au Département de génie du bâtiment, civil et environnemental et titulaire de la chaire de recherche en techniques d’intervention et d’assainissement en cas de déversements de l’Université Concordia.
« Il existe plusieurs règlements entourant les déversements de pétrole, même pour les secouristes, observe-t-il. Cependant, nous ne possédons pas l’expertise nécessaire pour traiter d’autres sources de pollution, comme les 1 680 tonnes de granulés de plastique qui se sont accumulées sur le littoral du Sri Lanka l’an dernier après que le porte-conteneurs X-Press Pearl a pris feu et a coulé. Les experts présents lors de la dernière conférence scientifique internationale sur les déversements de pétrole ont également fait part de leurs inquiétudes en ce qui concerne ces accidents de porte-conteneurs.
« Les gens ne savaient absolument pas comment réagir. Et les granulés qui n’ont pas atteint le littoral sont restés dans l’océan, et peuvent ainsi être entrés dans la chaîne alimentaire. »
L’équipe de recherche indique qu’il existe un besoin urgent de sensibiliser le secteur maritime, mais aussi le public, sur les risques que pose la menace émergente de la pollution causée par les conteneurs. Selon ses membres, une meilleure compréhension de ces risques pourrait entraîner l’amélioration des normes du secteur, de la coopération internationale, de la gestion des déversements et de la recherche scientifique dans le domaine.
Les autres coautrices et coauteurs de l’étude sont Xiaohan Yang, Xinya Chen et Huifang Bi, étudiantes au doctorat à Concordia, Zhaonian Qu, étudiant à la maîtrise à Concordia, ainsi que Baiyu Zhang de l’Université Memorial et Kenneth Lee de Pêches et Océans Canada.
Cette étude a été financée par l’initiative de recherche multipartenaire de Pêches et Océans Canada, Environnement et Changement climatique Canada, le Fonds de recherche du Québec – Nature et technologies (FRQNT) et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG).
Lisez l’article cité (en anglais) : « Emerging marine pollution from container ship accidents: Risk characteristics, response strategies, and regulation advancements. »