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La chercheuse engagée de l’Université Concordia Stéfanie Tremblay cherche à améliorer la prévention de la démence grâce à l’imagerie cérébrale

L’ex-membre de l’équipe canadienne de judo fait appel aux techniques d’IRM pour explorer les liens entre les facteurs de risque liés au mode de vie et le déclin cognitif
14 novembre 2023
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Femme souriante aux longs cheveux blonds foncés et aux yeux bleus, portant un haut noir et un blazer blanc.
« Je m’intéresse essentiellement à la manière dont les maladies cognitives apparaissent chez des personnes ayant un cerveau sain », explique Stéfanie Tremblay.

Selon une étude réalisée en 2022 par la Société Alzheimer du Canada, plus de 600 000 Canadiennes et Canadiens vivent avec une forme ou une autre de démence. D’ici 2050, ce nombre pourrait atteindre deux millions de personnes.

Le déclin impitoyable des capacités mentales et physiques qui accompagne ces maladies peut se révéler un véritable cauchemar, tant pour les personnes touchées que pour les amis et les proches qui s’occupent d’elles.

Pour la chercheuse engagée de l’Université Concordia Stéfanie Tremblay, la prévention demeure le premier moyen d’endiguer la vague des maladies neurologiques.

Elle étudie l’impact des maladies cardiovasculaires et de divers facteurs de risque sur la santé du cerveau au moyen de techniques d’imagerie par résonance magnétique (IRM). L’objectif est de découvrir des marqueurs précoces qui pourraient prédire la démence et les accidents vasculaires cérébraux, voire contribuer à prévenir plus efficacement ces maladies à l’avenir.

Les travaux de recherche doctorale de Mme Tremblay sont financés par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC).

Veiller à ce que moins de Canadiennes et de Canadiens soient contraints de vivre avec les graves conséquences d’un déclin neurologique est un véritable moteur pour Stéfanie Tremblay, une passion qui l’anime tant sur le plan universitaire que personnel.

En effet, cette ancienne athlète formée en kinésiologie a vécu de près des événements tragiques qui, par la suite, se sont révélés déterminants dans l’orientation de ses recherches actuelles.

« Des changements commencent à se produire dans le cerveau jusqu’à 20 ans avant le diagnostic. »

Vous avez amorcé votre parcours universitaire au Département de santé, de kinésiologie et de physiologie appliquée de l’Université Concordia avec l’objectif de devenir thérapeute du sport. Aujourd’hui, vous évoluez au sein du Département de physique. Qu’est-ce qui a changé?

Stéfanie Tremblay : Mes aspirations universitaires ont changé lorsque j’ai vécu une période de transition dans ma carrière d’athlète. Lorsque j’étais membre de l’équipe nationale de judo, je consacrais toute mon énergie à me qualifier en vue des Jeux olympiques de Rio de Janeiro, en 2016. Mais quand cela ne s’est pas concrétisé, j’ai commencé à remettre en question l’importance que j’accordais à la performance athlétique en tant qu’objectif ultime.

Durant cette période, j’ai également vécu le suicide de deux personnes de mon entourage. Évidemment, cela m’a beaucoup affectée. Je me suis mise à m’intéresser au cerveau, à ses mécanismes et aux facteurs qui conduisent aux problèmes de santé mentale.

J’en suis venue à vouloir poursuivre des recherches en neuroscience. Je suis donc allée voir le professeur Richard Courtemanche qui, durant mes études au premier cycle, donnait le seul cours de neuroscience au programme. Je lui ai dit que je voulais me joindre à son laboratoire de recherche. C’est ainsi qu’a commencé ma carrière universitaire dans ce domaine.

Parlez-nous de votre programme de maîtrise. Expliquez-nous en quoi il a contribué à ce que vous faites aujourd’hui.

ST : Je n’avais aucune expérience en recherche, mais Richard a été un excellent mentor. J’ai beaucoup appris en travaillant avec lui. Il m’a montré comment concevoir et programmer des expériences et m’a enseigné à formuler de bonnes questions de recherche. Il m’a aussi appris à m’orienter dans le paysage universitaire.

Mes travaux de maîtrise portaient sur le réseau qui relie le cervelet au cortex préfrontal, à l’intérieur du cerveau.

La plupart des gens considèrent le cervelet comme un élément du système nerveux qui nous aide dans nos fonctions motrices, telles que la posture et l’équilibre. Or, il s’avère que cette partie de l’encéphale joue aussi un rôle dans la cognition et les émotions et, par conséquent, subit des perturbations dans les troubles de l’humeur. Cette connaissance gagne de plus en plus de terrain au sein de la communauté scientifique. D’ailleurs, le cervelet a déjà été utilisé comme cible dans le traitement par neurostimulation profonde de la dépression et d’autres troubles chez l’humain.

C’est pourquoi j’ai commencé à m’intéresser à ce réseau nerveux et à la façon dont il répond à la stimulation cérébelleuse, à différentes fréquences. Dans quelle mesure peut-on modifier l’activité de ce réseau impliqué dans la régulation des émotions en stimulant le cervelet?

À la fin de mon parcours de maîtrise, je me suis inscrite à un cours de physique pour améliorer mes compétences en recherche quantitative. C’est là que j’ai rencontré ma directrice de thèse actuelle – Claudine Gauthier, professeure agrégée de physique – et que j’ai découvert les recherches fascinantes qui ont lieu dans son laboratoire.

Entrons dans le vif du sujet de vos travaux actuels. Que découvrez-vous grâce à l’imagerie?

ST : Je m’intéresse essentiellement à la manière dont les maladies cognitives apparaissent chez des personnes ayant un cerveau sain. De quelle façon peut-on utiliser les données d’IRM pour repérer le déclin le plus tôt possible et mettre en place des interventions appropriées?

Nous savons que les personnes souffrant d’hypertension et de maladies cardiovasculaires sont exposées à un risque accru de démence. C’est pourquoi j’étudie le cerveau des personnes qui souffrent de problèmes cardiovasculaires, mais qui ne présentent pas encore de troubles neurologiques tels que la démence ou l’accident vasculaire cérébral. Je cherche à savoir s’il est possible – grâce à l’imagerie – d’observer des tendances qui nous alerteraient sur le début d’un déclin. La détection d’anomalies à un stade précoce pourrait nous permettre d’intervenir à un moment où les chances de guérison sont plus grandes et, du coup, de prévenir les troubles neurologiques.

Mes recherches portent principalement sur la matière blanche, c’est-à-dire la partie du cerveau qui comprend les fibres reliant les différentes régions cérébrales. Je m’intéresse à la santé et à la structure de ces fibres qui permettent à notre cerveau de communiquer efficacement entre ces régions.

Je m’intéresse notamment à la myéline, la gaine isolante qui entoure les cellules nerveuses et qui accélère la communication dans le cerveau. La perte de myéline entraîne un ralentissement cognitif.

J’utilise aussi un ensemble de données du Centre StoP-Alzheimer, qui fait partie du Centre de recherche Douglas, à Montréal. Les participants à cette étude sont des personnes âgées qui présentent un risque de maladie d’Alzheimer en raison de leurs antécédents familiaux, mais qui n’étaient pas atteintes de troubles cognitifs au moment de leur inscription. En étudiant cette population vulnérable, nous espérons non seulement découvrir des signes précoces de la maladie d’Alzheimer, mais aussi contribuer à l’effort mondial de dépistage précoce et de prévention.

Pourquoi le dépistage précoce par imagerie est-il si important?

ST : Dans le cas d’une maladie comme la démence, nous savons aujourd’hui que des changements commencent à se produire dans le cerveau jusqu’à vingt ans avant le diagnostic. Cela nous donne une fenêtre temporelle pendant laquelle nous pouvons détecter ces processus pathologiques.

Je m’intéresse particulièrement aux changements du mode de vie comme outils de prévention du déclin cognitif – tels que le sevrage tabagique, l’exercice physique et une saine alimentation. Sachant que certaines personnes sont vulnérables, nous pouvons leur proposer ces mesures dès le début.

De nouveaux médicaments font également leur entrée sur le marché. Ceux-ci demeurent toutefois plus efficaces à un stade précoce de la maladie.

En dehors du laboratoire, vous êtes apparemment revenu au judo. Dites-nous-en davantage à ce sujet.

J’ai récemment été recrutée comme partenaire d’entraînement par une athlète paralympique, prétendante à une médaille aux prochains Jeux paralympiques de Paris, qui auront lieu en 2024. Je m’entraîne avec cette athlète deux fois par semaine et je me déplace avec elle pour ses tournois. J’espère bien pouvoir l’accompagner à Paris en septembre prochain.


Apprenez-en davantage sur le
Programme des chercheuses et chercheurs engagés de l’Université Concordia.

 

 



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