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La course à l’espace 2.0

La communauté de Concordia contribue à un nouvel âge d’or de l’exploration spatiale
16 juillet 2021
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Par Alexander Huls


Lorsque l’astromobile Perseverance de la NASA s’est posée sur Mars le 18 février 2021, le monde entier a été fasciné. L’événement a fait l’actualité internationale, a été partagé allègrement sur Twitter et a été regardé par plus de 21 millions de personnes grâce à la retransmission vidéo en direct de YouTube.

L’intérêt général reflétait un regain d’enthousiasme pour le cosmos et ses mystères. Mais il n’y a pas que le grand public qui s’en réjouit.

« C’est une période exaltante pour l’exploration spatiale », affirme Tim Haltigin, B. Sc. 2003, scientifique principal de missions et d’exploration spatiale à l’Agence spatiale canadienne (ASC). « C’est vraiment le début d’un nouvel âge d’or. »

À quoi ressemblera l’exploration spatiale, tant dans un avenir immédiat que lointain? Que faut-il pour en prendre pleinement conscience? Et quel rôle Concordia et ses diplômés peuvent-ils jouer?

Une voie plus facile vers les étoiles

Un entrepreneur de la trempe et de la richesse d’Elon Musk suscite toujours l’attention, peu importe ce qu’il cherche à faire. La création de SpaceX ne fait pas exception. La société semble faire les manchettes chaque semaine avec le lancement d’une fusée – qu’il s’agisse d’une fusée transportant des fournitures à la Station spatiale internationale (SSI), des satellites orbitaux ou des astronautes.

SpaceX n’est pas la seule entreprise privée qui s’est aventurée dans l’espace. Blue Orgin de Jeff Bezos et Virgin Galactic de Richard Branson ont elles aussi emboîté le pas.

« Ils ont eu une incidence énorme sur le milieu spatial », affirme Krzysztof Skonieczny, professeur auxiliaire et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en robotique aérospatiale à Concordia. « Ils font partie d’un écosystème commercial plus vaste qui se développe autour de l’exploration spatiale. »

Cela n’a pas toujours été le cas.

Virendra Jha croit que la recherche et les programmes universitaires pourraient être une cible importante pour un soutien supplémentaire.

« Pendant de nombreuses années, les programmes spatiaux ont été dirigés par des organismes gouvernementaux », explique Virendra Jha, Ph. D. 1982, personnalité d’exception de Concordia et ancien vice-président des sciences, de la technologie et des programmes de l’ASC.

Alors que de nombreuses entreprises privées investissent dans l’exploration spatiale pour rendre le tourisme spatial possible, offrant aux gens l’expérience passionnante de voir la Terre d’en haut, ce n’est pas la raison pour laquelle les professionnels du secteur comme M. Skonieczny et Jha sont excités.

C’est plutôt parce que des entreprises avec des budgets illimités, comme SpaceX, se sont tournées vers ce domaine afin de réduire le coût des lancements et ainsi augmenter leur fréquence. Pour le moment, ce service a permis aux acteurs clés d’envoyer plus facilement de la technologie dans l’espace. Mais elle sera également précieuse lorsque l’exploration spatiale gagnera du terrain et que des missions ambitieuses viseront des planètes et des lunes lointaines.

En d’autres termes, ces initiatives peuvent être dirigées par des entreprises privées, mais elles profitent à tous les acteurs de l’exploration spatiale.

« Nous souhaitons toujours que [ces entreprises] réussissent parce que ce qui est bon pour toute entreprise est bon pour l’ensemble du milieu », explique Carmit Tzoubari, B. Ing. 2014, ingénieure système au Jet Propulsion Laboratory de la NASA.

Répondre aux grandes questions

« Nous allons répondre à certaines questions fondamentales sur la formation de l’univers lui-même », explique Tim Haltigin. | Photo: Agence spatiale canadienne

Alors que l’essor des fusées du secteur privé continuera de répondre à un besoin pratique important, d’autres projets en cours sont susceptibles d’avoir une incidence dans un avenir proche : percer les mystères de l’univers.

Tout d’abord, il y a le télescope spatial James Webb, dont le lancement est prévu en octobre 2021. Né d’une collaboration entre la NASA, l’Europe et l’ASC, l’observatoire spatial utilisera une technologie infrarouge de pointe pour observer jusqu’à 13,6 milliards d’années-lumière.

Ce qui sera observé pourrait donner des réponses sur la façon dont l’univers — et la vie sur Terre — a été créé.

« Il s’agit essentiellement de revenir au début des temps », explique M. Haltigin de l’ASC. « Nous allons répondre à certaines questions fondamentales sur la formation de l’univers lui-même. »

L’OSIRIS-REx, lancé en 2016, pourrait fournir des révélations similaires. L’objectif de la sonde spatiale est d’étudier l’astéroïde Bennu, situé à environ 321 millions de kilomètres de la Terre qui pourrait offrir des indices sur notre existence.

« C’est une mission qui va nous permettre de comprendre les débuts du système solaire, comment les planètes se forment et peut-être d’où viennent les éléments constitutifs de la vie », ajoute M. Haltigin, qui a contribué au projet.

Depuis sa découverte de Bennu en 2018, l’OSIRIS-REx utilise un scanneur laser fabriqué par l’ASC – nommé OLA – pour effectuer des mesures géographiques détaillées de la surface de l’astéroïde. Il recueillera également des échantillons qui seront retournés sur Terre d’ici 2023.

Mars, la lune et la recherche de l’eau

Amener des humains sur Mars est l’un des plus grands rêves caressés par le secteur spatial. Il est probable que cela ne soit pas possible avant une autre décennie, mais de nombreux efforts sont en cours pour que ce rêve devienne réalité.

Lorsque Perseverance est arrivée sur Mars, c’était tout un exploit. Toutefois, l’astromobile est là pour parcourir la topographie de la planète (et recueillir des échantillons qu’on pourra examiner seulement en 2031) afin de mieux comprendre sa viabilité pour les humains. De même, il y a des projets favorables à la colonisation en cours comme le RASSOR, une excavatrice capable d’extraire l’eau du sol extraterrestre, ou le vaisseau spatial Orion avec un système de lancement jumelé assez puissant pour propulser des charges utiles ou des astronautes dans l’espace.

« Ce qui plaît à tout le monde, c’est l’expérience pratique, et je l’ai grandement acquise à Concordia », commente Carmit Tzoubari de la NASA. | Photo: Rose Pierce

La Lune jouera également un rôle central dans les futurs plans pour Mars. La NASA et d’autres agences internationales travaillent sur le Lunar Gateway, une station spatiale comme la SSI, qui sera en orbite autour de la Lune et sera terminée d’ici 2024. Fonctionnant de manière autonome (avec l’aide de la robotique externe fournie par l’ASC et d’un bras mécanique comme celui de la SSI), une partie de son objectif sera de servir de point de départ pour un voyage vers la planète rouge.

Gateway fait également partie du programme Artemis de la NASA, dont l’objectif est de permettre à l’humanité de fouler à nouveau le sol lunaire et d’y établir une base permanente un jour. Des alunissages seront lancés depuis la station afin de poursuivre l’étude de sa surface. Il pourrait s’agir du Programme d’accélération de l’exploration lunaire du Canada, une initiative de 150 millions de dollars visant à placer la première astromobile canadienne sur la Lune. Mais cela peut inclure aussi des missions vers le pôle Sud pour y trouver de l’eau afin de savoir surtout s’il y a de la vie sur la Lune et si on peut l’habiter.

L’eau sera également un facteur déterminant pour des missions plus lointaines dans notre système solaire.

« Lorsque nous parlons d’exploration humaine, l’eau est un élément essentiel », note Virendra Jha.

Carmit Tzoubari de la NASA ajoute : « Partout où nous trouvons de l’eau, nous trouvons de la vie. La NASA a donc cherché où il y a de l’eau dans notre système solaire pour essayer d’y trouver des signes de vie ».

Cela a permis la mise en place de missions vers deux autres lunes – Titan de Saturne et Europe de Jupiter.

« Il y a des preuves tangibles qu’il y a des mondes océaniques sous les couches de glace de ces lunes. Ce sont donc des destinations uniques dans le système solaire que nous n’avons pas encore eu l’occasion d’explorer de près », commente M. Skonieczny.

Cela va changer avec la mission Europa Clipper de la NASA, qui enverra un engin spatial en orbite autour de Jupiter, à la fois pour chercher de l’eau et voir s’il y a de la vie sur cette lune. Une mission appelée Dragonfly enverra un drone à la surface de Titan pour rechercher des résultats similaires.

Assurer l’avenir de l’exploration spatiale

« Il y a des preuves tangibles qu’il y a des mondes océaniques sous les couches de glace de ces lunes », commente Krzysztof Skonieczny.

La réalisation de projets aussi ambitieux nécessite naturellement un soutien financier. La répartition de ces fonds peut avoir une incidence déterminante sur la réalisation des rêves d’exploration spatiale de l’humanité.

Virendra Jha croit que la recherche et les programmes universitaires pourraient être une cible importante pour un soutien supplémentaire.

« Les scientifiques universitaires et les scientifiques au sein d’organismes gouvernementaux sont ceux qui mettent généralement l’accent sur l’exploration », remarque-t-il.

M. Skonieczny renchérit :

« J’ai l’impression qu’il y a un potentiel inexploité pour transposer davantage les efforts du Canada en matière d’exploration spatiale vers le milieu universitaire. »

Ses propos sont fondés, en partie, sur le potentiel du Club spatial de Concordia. Fondé il y a dix ans, le Club spatial de Concordia est une société qui permet aux étudiants de premier cycle et des cycles supérieurs de poursuivre leur passion pour l’espace par des projets pratiques.

« Cela donne aux jeunes étudiants l’occasion de s’impliquer », se réjouit Irina Stroica, membre actuelle du club, étudiante en génie mécanique et stagiaire à l’ASC.

Les membres du Club spatial de Concordia ont la chance de contribuer à quatre divisions : robotique, engins spatiaux, fuséologie et santé. Le travail actuel de chaque division donne un aperçu de l’avenir.

Un astromobile concue par des membres du Club spatial de Concordia, division robotique.

Robotique participe au développement d’une astromobile scientifique en mesure de venir en aide aux astronautes sur Mars. Engins spatiaux collabore au projet canadien CubeSat, une entreprise financée par l’ASC visant à lancer des satellites de la taille d’un grille-pain à partir de la SSI en 2021, afin d’effectuer des expériences et des observations.

Fuséologie conçoit des fusées civiles primées qui peuvent atteindre les limites inférieures de l’atmosphère terrestre – plus tôt cette année, une équipe de cette division du Club spatial de Concordia a remporté un grand prix de conception au Base 11 Space Challenge. Enfin, la division Santé poursuit l’exploration des technologies de la santé pour les missions dans l’espace.

Les efforts du Club spatial de Concordia ne méritent pas uniquement d’être soutenus en soi, mais également parce qu’ils donnent une expérience pratique à la main-d’œuvre future du secteur. « Ce qui plaît à tout le monde, c’est l’expérience pratique, et je l’ai grandement acquise à Concordia », commente Mme Tzoubari de la NASA. « C’est le genre de choses que les employeurs aiment voir. »

Mme Stroica a vu des employeurs considérer l’expérience d’autres diplômés et membres du Club spatial de Concordia. « Ils soulignent presque toujours quelque chose lié à l’espace ou à l’exploration spatiale, et cela me donne tellement d’espoir », mentionne-t-elle.

Cela devrait également donner espoir au secteur. L’élément vital de l’exploration spatiale est la collaboration – l’échange d’idées entre les novices et les aguerris de ce domaine. La réalisation de notre avenir – que ce soit avec la Lune, Mars, la lune de Saturne (Europe) ou les limites de l’univers – ne peut se faire qu’avec les personnes de toutes les disciplines prêtes à travailler ensemble.

« C’est parce que l’espace est synonyme d’enjeux considérables qu’il faut absolument collaborer; ces défis sont trop importants pour que [quiconque] puisse les relever seul », observe M. Haltigin.

Mais avec le nouvel âge d’or qui se profile à l’horizon, il ne doute pas que les gens relèveront le défi. « L’espace fait chaque jour de plus en plus partie de notre vie quotidienne. Cela ne peut que continuer ».



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