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Un professeur de Concordia soutient que les violences perpétrées dans l’histoire contre les peuples autochtones constituent un génocide

La déclaration publique de la Société historique du Canada reconnaît en des termes forts la brutalité exercée par le pays dans le passé, explique Steven High
8 juillet 2021
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Par Steven High


Fonctionnaires et écoliers à l'extérieur du pensionnat indien de Providence Mission, Fort Providence, Territoires du Nord-Ouest, vers 1920. | Avec l'aimable autorisation de LibraryArchives (Flickr CC)

Steven High est professeur d’histoire et membre fondateur du Centre d’histoire orale et de récits numérisés de l’Université Concordia. Dans la lettre d’opinion ci-dessous, il écrit au nom de la Société historique du Canada, dont il est le président actuel.

Cette lettre a été publiée à l’origine dans les quotidiens Montreal Gazette et Le Devoir.

La Société historique du Canada, qui représente 650 historiens professionnels de tout le pays, y compris les principaux spécialistes de la longue histoire de violence et de dépossession des peuples autochtones dans ce qui est aujourd’hui le Canada, convient que cette histoire justifie pleinement l’emploi du mot « génocide ».

Le génocide ne fait pas simplement référence à des massacres commis sur une période relativement courte. Il peut prendre d’autres formes et se prolonger dans le temps.

Le génocide a été désigné pour la première fois comme un crime de droit international en 1946 par les Nations unies, dans le sillage immédiat de l’Holocauste. Deux ans plus tard, il a été officialisé dans la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, qui a été ratifiée par 149 États, dont le Canada.

Selon l’article 2 de cette convention, le génocide est défini comme pouvant être l’un des actes suivants, commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe de personnes (et je cite) : le meurtre de membres du groupe ; des atteintes graves à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe ; la soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ; des mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ; le transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe.

Si l’on considère la longue durée de l’occupation coloniale européenne et de la dépossession des Autochtones, nous maintenons que l’intention génocidaire a été amplement établie dans la recherche historique. Ce point fait l’objet d’un large consensus parmi les experts historiques.

Les études historiques existantes, fondées sur des recherches approfondies dans les archives gouvernementales, les documents relatifs aux œuvres missionnaires, les études archéologiques et les témoignages écrits et oraux des survivants des pensionnats, de la rafle des années 1960 et des familles de femmes et de filles autochtones assassinées ou disparues, rendent cette conclusion on ne peut plus claire.

La récente confirmation de la présence de centaines de tombes non marquées sur le site d’anciens pensionnats d’Autochtones en Colombie-Britannique et en Saskatchewan s’inscrit dans une histoire plus vaste d’effacement physique des peuples autochtones au Canada.

Malheureusement, les récentes nouvelles en provenance de Kamloops et de Marieval ne seront pas les dernières, et nous nous attendons à ce que d’autres annonces soient faites d’un bout à l’autre du pays.

La Commission de vérité et réconciliation du Canada, et la Commission royale sur les peuples autochtones avant elle, a largement documenté la manière dont la violence du colonialisme de peuplement s’est propagée dans les communautés autochtones. Il en va de même pour le rapport final de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Il y a également eu un grand nombre d’enquêtes provinciales à travers le pays.

La récente enquête du coroner sur la mort de Joyce Echaquan, une femme atikamekw âgée de 37 ans et mère de sept enfants, dans un hôpital du Québec a suscité l’indignation face au racisme de notre système de santé. Malheureusement, les archives sont remplies d’histoires comme celle-ci.

Enfin, nous reconnaissons que les historiens, dans le passé, ont souvent été réticents à convenir que cette histoire est un génocide. Dans leur profession, les historiens ont donc contribué de façon durable et tangible au refus canadien de s’attaquer à l’histoire de la colonisation et de la dépossession de ce pays.

Notre incapacité, en tant que société, à reconnaître cette histoire pour ce qu’elle est et les façons dont elle se perpétue dans le présent a servi à faire durer la violence. Il est temps pour nous de briser ce cycle historique. Nous encourageons les Canadiens à reconnaître cette histoire pour ce qu’elle est : un génocide.


Lisez la déclaration de la Société historique du Canada pour la fête du Canada :
The History of Violence Against Indigenous Peoples Fully Warrants the Use of The Word “Genocide” (anglais seulement).

 



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