Une corrélation existe entre les problèmes comportementaux chez les enfants et une faible variabilité de la fréquence cardiaque chez les parents, selon une nouvelle étude réalisée à l’Université Concordia

Tous les parents vous diront qu’élever un enfant n’est pas de tout repos. Si cette expérience peut être une grande source de joie, d’amour et d’épanouissement, il n’en reste pas moins que le stress émotionnel, financier et conjugal représente un défi pour toute famille.
Cela est particulièrement vrai pour les parents d’enfants présentant des problèmes de comportement. Une étude menée par une équipe de recherche de l’Université Concordia a révélé que ces facteurs de stress sont associés à une plus faible capacité d’autorégulation chez les parents, et que les pères sont particulièrement vulnérables à ce chapitre s’il existe également des tensions au sein du couple.
Publiée dans l’International Journal of Psychophysiology, l’étude a porté sur 80 couples hétérosexuels vivant sous le même toit et ayant des enfants d’âge préscolaire. Les parents ont été conviés à une séance de laboratoire au cours de laquelle ils ont passé un électrocardiogramme qui enregistrait leur activité cardiaque. Ils ont également rempli une liste de vérification visant à évaluer les problèmes de comportement de leur enfant et ont discuté des défis que ces problèmes posaient à leur mariage.
On a aussi demandé aux parents de tenir un journal conjugal et de noter les éventuelles interactions négatives dans leur couple sur une période de six jours.
Les chercheuses et chercheurs ont porté une attention particulière à l’effet des comportements de l’enfant et des facteurs de stress conjugal sur la variabilité de la fréquence cardiaque à haute fréquence (VFC). Il s’agit des très petites fluctuations qui surviennent dans les intervalles entre les battements du cœur. Contrairement aux idées reçues, ces petites fluctuations sont souhaitables, car elles indiquent que le corps est prêt à réagir rapidement en réponse à des défis.
La variabilité de la fréquence cardiaque à haute fréquence est influencée par le système nerveux parasympathique, qui gère « le repos et de la digestion » et favorise le calme et la récupération de l’organisme. Elle agit comme un contrepoids à la réaction de lutte ou de fuite déclenchée par le système nerveux sympathique en réponse au stress.
« Une variabilité de la fréquence cardiaque élevée indique que la personne est mieux à même de déployer des ressources d’autorégulation pour répondre de manière adaptative aux facteurs de stress. On l’associe à plusieurs états bénéfiques tels qu’un risque de dépression plus faible, une meilleure capacité d’adaptation au stress, une plus grande maîtrise de soi et un nombre moins élevé de cycles d’interactions négatives avec les enfants », explique l’auteure principale de l’étude, Sasha MacNeil, ancienne titulaire de la bourse Vanier (Ph. D. 2023) et aujourd’hui chercheuse postdoctorale à l’Université McGill.
Les problèmes de comportement influent sur toute la dynamique familiale
Les chercheuses et chercheurs ont constaté que les parents dont les enfants avaient un comportement difficile, comme l’agressivité, la défiance ou l’hyperactivité, avaient tendance à avoir une VFC plus faible. Cela donne à penser qu’ils pourraient éprouver plus de difficulté à rester calmes et à réagir de manière adaptative en situation de stress.
Le lien entre les problèmes de comportement de l’enfant et une faible variabilité de la fréquence cardiaque est plus marqué en cas de stress conjugal. Les pères étaient particulièrement sensibles dans ce type de situation. Lorsque leur partenaire signalait des degrés plus élevés de stress conjugal, les chutes de la VFCmv étaient plus importantes chez les pères.
« Pour les pères, cela signifie que le fait d’avoir un enfant présentant des problèmes de comportement aigus et une partenaire qui rapporte un stress plus élevé dans la relation est associé à une moins bonne capacité d’autorégulation, indique Sasha MacNeil. En revanche, chez les mères, la variabilité de la fréquence cardiaque est associée aux problèmes de comportement de leurs enfants, mais cette corrélation n’est pas amplifiée par le stress conjugal.
« Ces résultats montrent qu’il est important de prendre en compte la dynamique familiale dans son ensemble pour soutenir les parents, et pas seulement la relation avec l’enfant, conclut Sasha MacNeil. Il est important de réfléchir à ce que nous pouvons faire pour soutenir les parents dans leurs interactions mutuelles au cours de ces périodes critiques. Ceci est particulièrement pertinent pour les pères, qui, en raison de leur socialisation, sont susceptibles d’avoir moins de ressources de soutien en dehors de la relation de couple vers lesquelles ils pourraient se tourner pour les aider à s’autoréguler. »
Jean-Philippe Gouin, professeur au Département de psychologie, a supervisé la recherche. Chelsea da Estrela (Ph. D. 2020) et Warren Caldwell (Ph. D. 2020), actuellement au Centre universitaire de santé McGill, ont participé à l’étude.
L’étude a été financée par les Instituts de recherche en santé du Canada, le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada et le Programme des chaires de recherche du Canada.
Lisez l’article cité : « Child and marital stress are associated with a psychophysiological index of self-regulatory capacities among parents of preschool children. »