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Titulaire d’un diplôme en design de Concordia, Lucas LaRochelle coconçoit des avenirs hypothétiques grâce à l’apprentissage machine

Son projet QT.bot table sur la réussite de Queering the Map, initiative d’archives numériques générées par la communauté
12 août 2021
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« QT.bot est la progéniture scélérate de Queering the Map », affirme Lucas LaRochelle.
« QT.bot est la progéniture scélérate de Queering the Map », affirme Lucas LaRochelle.

Lorsque Lucas LaRochelle a lancé son projet d’archives numériques Queering the Map il y a quatre ans, ol n’aurait jamais imaginé l’ampleur qu’il prendrait. Mais ce qui a commencé par cinq points sur une carte Google est rapidement devenu un répertoire de plus de 138 000 récits d’expériences queer axées sur le lieu, générés par des utilisatrices et utilisateurs du monde entier.

Lucas LaRochelle (B. Bx-arts 2021), qui a récemment obtenu son diplôme de design et d’arts numériques, tire parti de ces récits en recourant à l’apprentissage machine pour poser de nouvelles questions sur les espaces et les avenirs queer.

QT.bot, son nouveau projet, consiste en un modèle d’intelligence artificielle (IA) formé à l’aide des données textuelles et visuelles issues de Queering the Map, soit à la fois les récits partagés par les participants et les images correspondant à leurs points de localisation dans Google Maps. Le résultat est un esprit numérique qui, espère l’artiste, révélera des futurs hypothétiques queer et trans ainsi que les endroits où ils se réaliseront.

« J’attache une grande importance au concept de futurition, car de bien des points de vue, le présent me semble invivable ou à tout le moins insuffisant », explique-t-ol en faisant allusion à l’oppression soutenue que subissent aujourd’hui les personnes LGBTQ2IA+.

« Imaginer une machine apte à collaborer avec nous pour nous permettre d’entrevoir ce à quoi pourrait ressembler l’avenir constitue pour moi une stratégie de survie. »

« Assis avec toi, ici dans l’avenir »

Si le succès de Queering the Map a lancé la carrière de Lucas LaRochelle dans les domaines de la conception et de la recherche en matière de cultures numériques queer et trans, d’archivage communautaire et de médias cocréatifs, ol se méfie de plus en plus de l’attention que suscitent les archives.

« Mon appréhension quant à la manière dont le projet – en tant qu’outil de recherche – pourrait être mal employé a grandi en même temps que celui-ci », explique-t-ol.

« Que signifie la représentation à l’ère de la surveillance? L’idée qu’on puisse déduire des récits de Queering the Map un quelconque fait concret à propos de la vie queer ou trans est entièrement contraire à la pluralité des points de vue que le projet cherchait à explorer. »

C’est de ce malaise qu’est né QT.bot, « progéniture scélérate de Queering the Map », comme l’appelle Lucas LaRochelle avec humour.

La première production du projet d’IA est une brève vidéo intitulée Sitting here with you in the future (« assis avec toi, ici dans l’avenir »), qui consiste en une série de phrases générées par apprentissage machine à partir des récits de Queering the Map, superposées sur des images à 360 degrés issues de Google Maps qui se fondent les unes dans les autres.

Voici quelques exemples de phrases qui figurent dans la vidéo :

J’ai appris que le queer insuffle le merveilleux.

Nous avons savouré crème glacée et Coldplay.

Quelle joie d’avoir croisé chemin avec ma transition!

« J’aime ces histoires parce qu’elles vous laissent négocier la relation entre représentation et surveillance, envisager l’opacité comme un outil permettant de bâtir un monde, et s’y aventurer un peu, mais pas complètement », souligne l’artiste.

Échec de lisibilité

Quelques mois avant la pandémie de COVID-19, Lucas LaRochelle a inauguré le projet QT.bot au centre d’art autogéré Ada X, à Montréal – son dernier événement public avant le début de la pandémie. Plus récemment, des extraits du projet ont été affichés sur des panneaux à Linz, en Autriche.

« L’accueil a été formidable, rapporte-t-ol. Je m’intéresse particulièrement à l’écho que trouvent les récits chez les gens, à la manière dont ils fonctionnent comme des outils qui érodent les conditions actuelles. C’est là que le projet prend tout son sens. »

Privilégiant les médias cocréatifs, Lucas LaRochelle s’attache maintenant à rendre les modèles d’IA accessibles à tous.

« Lorsque j’envisage comment travailler de manière responsable avec des données générées par les communautés dont je fais partie, le fait de leur fournir les moyens d’utiliser les outils de l’apprentissage machine plutôt que de les accumuler me semble un impératif éthique. »

La prochaine étape est de développer une plateforme Web qui permettra aux usagers d’interagir avec QT.bot, ce qui ouvrira de nouvelles avenues au projet.

Lucas LaRochelle s’empresse de préciser que l’objectif de QT.bot n’a jamais été d’imiter efficacement la parole humaine. En fait, ol prend soin de ne former les modèles que jusqu’à un certain point, et de rechercher les récits qui ne fonctionnent pas parfaitement.

« Je m’intéresse davantage à la manière dont la fantaisie de l’existence et des mondes queer et trans rend la vie possible. Or, l’échec de la logique dans un contexte élargi ou l’échec de la lisibilité parfaite favorisent notamment cette possibilité. »


Regardez
Sitting here with you in the future, première production du projet d’intelligence artificielle QT.bot de Lucas LaRochelle.

Renseignez-vous sur le Département de design et d’arts numériques de l’Université Concordia.

 

 



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