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Kama La Mackerel

Dans le sillage de l’île-fèm, le souffle du corps trans

3 septembre - 12 décembre 2025

À propos de l'exposition

Dans le sillage de l’île-fèm, le souffle du corps trans réunit un ensemble d’œuvres issues de la pratique interdisciplinaire de Kama La Mackerel, développée au fil de la dernière décennie. Installations textiles, photographies, créations sonores et vidéos rituelles investissent les vitrines York de la Galerie FOFA dans une méditation poétique sur le genre, les filiations, la mémoire et les possibles réparations des blessures coloniales.

Au cœur de l’exposition, se déploie la relation intime et entrelacée entre le corps trans et ce que La Mackerel nomme le « corps-île » – figure à la fois spirituelle et géographique, essentielle à sa démarche. L’île, longtemps fantasmée par le regard colonial comme un espace vide, disponible à l’exploitation et à l’abandon, se révèle ici comme une présence fèm façonnée par des mémoires écologiques, historiques, ancestrales, minérales et géologiques. L’île-fèm y apparaît non seulement comme métaphore, mais aussi comme présence tangible : lieu de douceur, de refus, de parenté et de réappropriation.

Trans Affirmations, installation textile peinte à la main sur des saris portés par la mère de l’artiste, donne le pouls de l’exposition. Ces étoffes portent une filiation d’héritage et de guérison intergénérationnelle, inscrivant la réconciliation intime avec la mère dans une revendication collective plus vaste : visibilité, protection et amour pour les personnes trans. La soie, peinte à l’acrylique, devient à la fois surface et invocation, incarnant une poétique trans de l’héritage fèm.

En écho à cette installation, une série de portraits photographiques met le corps trans de l’artiste en dialogue contemplatif avec les paysages de son île natale, Maurice. Issus de rencontres lentes et rituelles, ces portraits ouvrent une relation méditative avec le territoire, le geste et la présence. Ils détournent l’esthétique coloniale de la carte postale tropicale et proposent de nouvelles cartographies du soi en relation au lieu. Paré, offert ou immergé, le corps devient île : souverain, vulnérable et radicalement présent. Ancré dans le rituel et la spiritualité ancestrale, ce processus réveille des mémoires personnelles, intergénérationnelles et écologiques, faisant de ces images des portails vers des devenirs, résistances et retours queer et trans.

Sur un lit de sel, une installation vidéo monocanal déploie gestes rituels et mouvements poétiques, tandis qu’un paysage sonore trilingue – anglais, français et kreol – emplit l’espace de souffles ancestraux et de résonances vibratoires. Ces strates sonores et matérielles composent un écosystème immersif de mémoire.

Le texte, quant à lui, circule partout : non seulement dans sa forme visuelle, mais aussi comme atmosphère. Des archipels de poèmes flottent dans l’air et se déposent dans le sel. Chaque œuvre porte un fragment d’une cosmologie plus vaste, où la transitude n’est ni expliquée ni isolée, mais affirmée, tissée dans les mémoires, les terres et les désirs.

Conçue en dialogue avec l’architecture des vitrines, Dans le sillage de l’île-fèm, le souffle du corps trans invite à la lenteur, à l’attention et au soin. C’est un espace où genre, géographie, deuil et devenir s’entrelacent – où la soie garde mémoire des gestes, où le sel porte l’histoire, et où les corps trans trouvent leur place, non en marge, mais au centre de leurs propres archipels.

Photo montrant l'artiste vêtue d'une robe à fleurs, allongée sur une falaise au bord de l'océan, la tête tournée vers l'appareil photo. Cliff body i / Corps falaise i, de la série Queering the Is/land Body, 2023. Photo par Ashvin Ramdin
Photo montrant l'artiste vêtue d'une robe turquoise à fleurs jaunes, regardant l'appareil photo et debout parmi les feuilles et les vignes de la forêt. Forest body i / Corps forêt i, de la série Queering the Is/land Body, 2023. Photo par Ashvin Ramdin

Biographie

Kama La Mackerel est écrivaine multilingue, artiste visuelle, performeuse, éducatrice, traductrice littéraire et ritualiste, dont l’œuvre et la vie s’enracinent dans un engagement profond envers l’amour, la justice et l’émancipation, tant individuelle que collective. Nourrie par des recherches sur l’insularité, la mémoire océanique, la poétique trans, la créolité et les écologies décoloniales, sa pratique interdisciplinaire détourne et reconfigure les esthétiques dominantes pour y faire émerger des vocabulaires décoloniaux et queer/trans, là où historiquement, ils avaient été effacés ou réduits au silence. Cette démarche investit ainsi les espaces interstitiels comme des terrains fertiles où se tissent la solidarité, la résistance et l’affirmation des corps et des voix marginalisés.

Son travail a été présenté dans des galeries, théâtres, lieux de diffusion et universités au Canada et à l’international. Iel est l’autrice de deux ouvrages : Indrazaal et la quête de l’océan (Éditions KATA, 2023) et ZOM-FAM (Metonymy Press, 2020). Originaire de l’île Maurice, Kama a vécu en Inde avant de s’établir à Tiohtià:ke/Montréal en 2012.

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