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Communiqué de presse

Alarmistes ou bienveillants, les médias sociaux influencent les attitudes envers les réfugiés

Une chercheuse de l’Université Concordia étudie les répercussions – politiques et autres – du bavardage en ligne

Montréal, le 14 septembre 2016 – Au 28 août 2016, quelque 30 275 réfugiés syriens étaient arrivés au Canada. Le gouvernement fédéral a d’ailleurs dépensé 319 millions de dollars en réponse à la crise et contribue grandement aux efforts de relogement et d’intégration.

Parallèlement, on demande aux citoyens de faire leur part afin d’accueillir les nouveaux arrivants. Toutefois, à la suite des attaques terroristes en Occident, le sentiment anti-réfugié s’implante dans les médias sociaux. L’essence des messages peut alors facilement passer de l’ouverture à la peur.

Nadia Naffi, doctorante à l’Université Concordia, et sa directrice de thèse Ann-Louise Davidson, professeure agrégée de sciences de l’éducation, ont récemment publié un article dans la revue Personal Construct Theory & Practice. Elles y montrent comment les spécialistes en sciences sociales étudient l’inclusion et l’intégration des réfugiés syriens dans leurs sociétés d’accueil.

« Si les citoyens du pays d’accueil ne sont pas prêts à recevoir les réfugiés, les efforts investis et les budgets dépensés le seront en vain. Les nouveaux arrivants n’auront jamais le sentiment qu’ils sont chez eux et ne deviendront jamais les citoyens productifs que l’on souhaite », explique Mme Naffi.

La chercheuse examine à présent le rôle considérable que jouent les médias sociaux dans ce processus.

Ses travaux actuels tentent ainsi de comprendre comment les adolescents et les jeunes adultes – soit la tranche de population qui utilise le plus les médias sociaux – interprètent les interactions en ligne, puis décident d’aller au-devant des réfugiés ou de les exclure selon ces interprétations.

« Une fois qu’on a déterminé la nature de l’impact des médias sociaux sur la propension à l’inclusion des jeunes, on peut concevoir des méthodes pour atténuer les effets négatifs et renforcer les effets positifs », ce qui est crucial à une intégration réussie des réfugiés d’après Mme Naffi.

Des tragédies partagées, des craintes intensifiées

Nadia Naffi a recruté 20 Canadiens âgés de 16 à 24 ans de diverses régions et 22 jeunes du Royaume-Uni, de France, de Belgique, d’Italie, de Pologne, du Portugal, de Grèce, du Liban et de plusieurs autres pays.

Elle s’est entretenue avec eux afin de comprendre comment ils interprétaient les réactions en ligne à la crise des réfugiés syriens après les attaques terroristes à Paris et à Bruxelles ainsi que les agressions sexuelles à Cologne, largement attribuées à des étrangers.

« Durant ces événements extrêmes, les jeunes avaient accès à des environnements en ligne où des tragédies étaient partagées, des sentiments de désespoir communiqués et des craintes intensifiées », précise-t-elle.

« Cela a donné lieu à un large éventail de réponses. Au Canada, une division s’est créée entre ceux qui appuyaient l’arrivée des réfugiés – principalement parce que cela correspondait à leur définition de l’identité canadienne – et ceux qui s’y opposaient et qui en appréhendaient les retombées. Internet en général et les médias sociaux en particulier ont facilité la dissémination du racisme et de l’intolérance. »

Les participants à l’étude ont remarqué que les opposants au relogement des réfugiés syriens se faisaient plus entendre que les partisans de celui-ci, et que les messages négatifs demeuraient présents à l’esprit. La plupart des personnes interrogées trouvaient également que les réfugiés syriens étaient déshumanisés dans les médias sociaux, et dépeints comme un problème à résoudre plutôt que comme des individus.

« Après avoir lu des messages en ligne, nombre de participants ressentaient le besoin de compenser hors ligne les opinions négatives partagées sur le Web. Ils ont aussi prédit que les jeunes de la société d’accueil qui avaient lu des messages négatifs sur Internet, mais qui n’avaient jamais rencontré de réfugiés syriens auparavant, garderaient leurs distances lorsqu’ils croiseraient “l’autre” pour la première fois. Ils auraient peur de l’approcher », affirme Mme Naffi.

Un impact considérable

« Par ailleurs, les sujets de l’étude ont prédit que les jeunes réfugiés syriens qui avaient lu des messages en ligne, mais qui n’avaient jamais rencontré de jeunes de la société d’accueil auparavant, se tiendraient également à distance, ne sachant pas qui les accepterait et qui préférerait qu’ils demeurent dans une zone de guerre », poursuit Nadia Naffi.

« La plupart des participants ont confirmé que, si elles n’étaient pas atténuées d’une manière appropriée, les interactions dans les médias sociaux auraient un impact considérable sur le niveau d’inclusion et d’intégration des réfugiés syriens dans les pays d’accueil ».

Pour la chercheuse, l’étude constitue un premier pas vers l’élaboration de recommandations destinées à aider les éducateurs, les travailleurs sociaux et les représentants gouvernementaux à mieux intervenir afin d’inclure et d’intégrer les réfugiés syriens.

« J’espère que les résultats de cette étude éclaireront les décideurs quant aux enjeux entourant la façon dont une société d’accueil interprète la présence potentielle de nouveaux arrivants en fonction du contenu partagé en ligne », conclut-elle.


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