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Les effets bénéfiques de l’ocytocine pourraient être moindres qu’on ne le croyait, selon une nouvelle étude de Concordia

Autrefois proclamé « hormone de l’amour », le neuropeptide a aussi des effets négatifs chez les personnes isolées et dépressives
22 septembre 2021
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Man in white shirt sitting sadly
Photo by Ben White from Unsplash

Au royaume des neuropeptides, l’ocytocine se fait remarquer. Molécule messagère étroitement associée à l’empathie, à la confiance, à la réduction du stress et de l’anxiété ainsi qu’à l’amélioration des relations interpersonnelles et de l’activité sexuelle, l’ocytocine a été surnommée l’« hormone de l’amour » dans certains médias populaires et même promue comme une drogue de l’amour sur Internet.

Parue dans la revue Social Cognitive and Affective Neuroscience, une nouvelle étude menée par des chercheurs de l’Université Concordia parvient toutefois à une conclusion beaucoup plus nuancée. En fait, lorsqu’il est question de mémoire, l’ocytocine peut stimuler les sentiments négatifs, particulièrement chez les personnes manifestant des symptômes aigus de dépression ou socialement isolées.

Shiu (Kelvin) Wong, ancien boursier postdoctoral Horizon, est l’auteur principal de l’étude, tandis que Mark Ellenbogen, professeur de psychologie et directeur du Centre de recherche en développement humain, en est le chercheur principal. Christopher Cardoso, récent titulaire d’un doctorat de Concordia, Mark Anthony Orlando, doctorant à Concordia, et Christopher A. Brown, doctorant à l’Université Adler de Vancouver, ont corédigé l’article.

Smiling man with dark hair and glasses « La principale conclusion de l’article est que lorsqu’il est question d’ocytocine », le contexte est important, souligne Shiu (Kelvin) Wong.

« Nous avons découvert que l’ocytocine comporte nombre d’effets contextuels qui contredisent la notion qu’elle augmente la confiance, entre autres », affirme Mark Ellenbogen.

Les chercheurs croient que l’ocytocine, lorsqu’elle est consommée au moyen d’un vaporisateur intranasal, peut avoir une incidence considérable sur la remémoration qui diffère selon le contexte social de consommation. Quand l’ocytocine était consommée en présence d’un assistant de recherche offrant un soutien, les souvenirs étaient plus vifs, ce qui n’était pas le cas si la consommation avait lieu sans contact social. D’ailleurs, les participants à l’étude qui présentaient des symptômes aigus de dépression et prenaient de l’ocytocine se rappelaient plus de souvenirs négatifs lorsque la consommation avait lieu en situation d’isolement social.

Smiling man in blue shirt on college campus « L’ocytocine pourrait grandement bénéficier à certaines personnes dans certains contextes, mais son utilisation indiscriminée comporte des risques », selon Mark Ellenbogen.

Un contact humain bénéfique

Les chercheurs ont mené deux études indépendantes. La première comptait 48 participants, dont 25 % rapportaient des symptômes de dépression bénins ou graves. Ils devaient effectuer deux visites en laboratoire à une semaine d’intervalle. Lors de la première visite, ils ont reçu une dose d’ocytocine ou un placebo. Alors qu’ils étaient assis seuls à un ordinateur, on leur a montré 78 mots indices positifs, négatifs ou neutres, et demandé de se rappeler des souvenirs. Les participants ont évalué le caractère positif ou négatif de ces souvenirs, de même que leur vivacité. Cette procédure a été répétée lors de la seconde visite, à cela près que c’est l’autre composé qui était administré avant le test.

Les chercheurs ont écrit que « les personnes présentant des indices de dépression plus élevés rapportaient des souvenirs de valence plus négative à la suite de l’administration d’ocytocine par voie intranasale – comparativement à celles ayant consommé un placebo –  durant un test de mémoire sur ordinateur ».

Dans la seconde étude, qui comportait deux séances, on a montré à 63 participants des mots indices similaires, dont certains étaient cette fois présentés par un expérimentateur humain, tandis que d’autres étaient présentés par un ordinateur dans une pièce où chaque sujet se trouvait seul. Les participants en présence de l’expérimentateur ont rapporté des souvenirs plus vifs après avoir consommé de l’ocytocine, contrairement à ceux ayant subi le test par ordinateur.

Tout comme dans la première étude, les participants présentant des indices de dépression plus élevés qui étaient exposés à l’ocytocine rapportaient des souvenirs plus négatifs lorsque le test s’effectuait par ordinateur et en isolement. Ce n’était toutefois pas le cas des sujets qui avaient subi le test en présence d’un chercheur.

Un mélange d’espoir et de prudence

« La principale conclusion de l’article est que lorsqu’il est question d’ocytocine, le contexte est important, souligne Shiu (Kelvin) Wong. Ce médicament ne peut pas être administré dans n’importe quelle situation. Nous devons donc agir avec beaucoup de prudence. »

L’ocytocine comporterait des avantages cliniques dans certaines situations. Selon Mark Ellenbogen, la psychothérapie pourrait s’avérer le contexte idéal pour l’administration d’ocytocine, en cela que les psychothérapeutes dûment formés assurent un environnement axé sur le soutien non critique et l’empathie.

« Il s’agit en quelque sorte d’une mise en garde, conclut-il. L’ocytocine pourrait grandement bénéficier à certaines personnes dans certains contextes, mais son utilisation indiscriminée comporte des risques. »

Lisez l’article cité : Depressive symptoms and social context modulate oxytocin’s effect on negative memory recall.



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