Le saumon et d’autres espèces de poissons apparentées en déclin à l’échelle mondiale depuis 1980, selon une étude de l’Université Concordia

La quantité mondiale de saumons, de truites et d’autres poissons apparentés (les salmonidés) a diminué de près de 40 % depuis 1980, selon une nouvelle étude menée par une équipe de recherche de l’Université Concordia.
L’étude, publiée dans la revue Fish and Fisheries, est basée sur un nouvel ensemble de données élaboré à partir de publications concernant onze espèces de salmonidés et couvrant plus de 1 000 cours d’eau répartis dans 27 pays.
L’équipe de recherche a compilé des données tirées de plus de 330 sources, dont des études universitaires, des rapports gouvernementaux et des documents de littérature grise – soit des documents non publiés ou non commerciaux, comme des documents techniques, des rapports internes d’organismes et des évaluations environnementales. La plupart des données proviennent des États-Unis, du Canada et de la Nouvelle-Zélande. L’échantillonnage des poissons s’échelonne sur une période de 84 ans, de 1937 à 2021.
Kyleisha Foote, auteure principale de l’étude, a obtenu son doctorat à Concordia en 2024 et est maintenant boursière postdoctorale à l’Université Memorial de St. John’s, à Terre-Neuve-et-Labrador. Elle affirme que la forte diminution de la biomasse des salmonidés – c’est-à-dire le poids total des organismes vivants dans une zone donnée – n’a rien de surprenant.
« Les résultats ne m’ont pas étonnée, car de nombreux rapports ont déjà montré le déclin des salmonidés et d’autres poissons d’eau douce, mais ces études portaient généralement sur des populations locales un peu partout dans le monde », commente-t-elle.
« Ce résumé confirme que la littérature corrobore les tendances générales. Et bien qu’il soit difficile de déterminer ce qui cause ce déclin, nous savons que de nombreux cours d’eau sont gravement touchés par la dégradation des habitats, le réchauffement climatique, la régularisation et la surexploitation. »

Un déclin sur plusieurs décennies – mais pas universel
L’équipe de recherche a également observé que la biomasse des salmonidés n’est pas répartie de manière égale. Entre 2000 et 2020, la biomasse moyenne s’élevait à 5,4 grammes par mètre carré (g/m²) – une diminution importante par rapport à la moyenne de 8,6 g/m² enregistrée en 1980.
Toutefois, un petit nombre de cours d’eau affichent des concentrations très élevées de salmonidés. Les 10 % de cours d’eau ayant les quantités de salmonidés les plus importantes ont été classés comme « excellents », avec un seuil de biomasse de 12 g/m². Le 1 % de cours d’eau ayant les quantités les plus importantes a été qualifié d’« exceptionnel », avec un seuil de 36,5 g/m².
« Ces cours d’eau doivent réunir plusieurs conditions favorables pour présenter une biomasse aussi élevée », explique James Grant, professeur au Département de biologie et coauteur de l’étude.
« Il peut s’agir d’une bonne température, d’un bon débit ou d’une productivité adéquate. C’est encore un peu mystérieux, mais nous continuerons d’explorer la base de données pour cerner les facteurs qui, combinés, permettent d’atteindre une biomasse élevée et rendent les cours d’eau hautement productifs. »
La base de données remet également en question une hypothèse de longue date concernant la biomasse maximale qu’un cours d’eau peut supporter. La limite supérieure auparavant admise de 30 g/m² s’est révélée trop basse : quatorze cours d’eau, soit 1,3 % des cours d’eau pris en compte, dépassent ce seuil.
En effet, le ruisseau Resurrection, en Alaska, a enregistré la biomasse la plus élevée de la base de données, avec 70,3 g/m² de saumon coho, certaines zones atteignant même 169 g/m². Parmi les autres cours d’eau à forte biomasse, on compte notamment :
- le ruisseau Patterson, en Nouvelle-Écosse, avec 67,6 g/m² d’omble de fontaine;
- le ruisseau Sand, au Wyoming, avec 63,4 g/m² de truites brunes et arc-en-ciel;
- le ruisseau Mušlov, en Tchéquie, avec 61,5 g/m² de truite brune.
L’équipe de recherche précise cependant que la biomasse varie selon la période de l’année, les niveaux atteignant généralement leur pic au printemps.

Un nouvel outil ouvert aux contributions
Selon Pascale Biron, professeure au Département de géographie, urbanisme et environnement et coauteure de l’étude, la base de données aura un impact durable pour les chercheurs et chercheuses qui étudient les populations mondiales de salmonidés.
« Maintenant que la base de données est publiée, d’autres équipes de recherche pourront l’utiliser. Nous espérons qu’elle deviendra une référence et que les scientifiques y contribueront lorsqu’ils obtiendront de nouvelles données sur la biomasse. »
L’étude a été subventionnée par le Programme de subventions à la découverte du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie (CRSNG), le programme de bourses de formation au doctorat du Fonds de recherche du Québec – secteur Nature et technologies (FRQNT) ainsi que le Groupe de recherche interuniversitaire en limnologie (GRIL).
Lisez l’article cité : Salmonid Biomass in Streams Around the World: A Quantitative Synthesis.