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Kimberley Manning : « Je souhaite que nous puissions devenir la première université féministe en Amérique du Nord »

La nouvelle directrice de l’Institut Simone-De Beauvoir fait part de sa vision
7 mars 2016
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Par Elisabeth Faure


Kimberley Manning

Kimberley Manning a beaucoup de travail à accomplir. Et elle ne s’en plaint pas.

Le 1er janvier, la nouvelle directrice est entrée en fonction à l’Institut Simone-De Beauvoir.

Professeure agrégée au Département de science politique, Mme Manning a officiellement obtenu le poste le 1er juin 2015, mais elle était alors en congé.

À l’approche de la Journée internationale des femmes, le 8 mars, nous avons rencontré la Pre Manning pour discuter de féminisme, d’études des femmes et de ses projets ambitieux pour l’institut.


Comment ont été vos premières semaines de travail?

Kimberley Manning : Extraordinaires. Je n’aurais pas pu rêver d’une meilleure introduction aux tâches administratives. J’ai profité d’un mentorat attentif et individuel de la part de personnes à tous les échelons de l’Université, dont des collègues et des employés de l’institut même.

Je ne peux vous dire à quel point j’ai été sensible aux précieux conseils que j’ai reçus dès mon arrivée, tout comme à la résolution de problèmes en groupe et à l’atmosphère de collaboration.

En outre, mes collègues et les employés du Département de science politique, dont je proviens, m’ont eux aussi généreusement offert leur aide et leur soutien pendant cette transition.

Dire simplement que je me plais dans mon nouveau rôle serait sous-estimer la réalité. Je suis très enthousiaste d’avoir bénéficié de cette chance incroyable.

Quelles sont certaines des initiatives importantes que vous voulez lancer?

KM : Il y en a plusieurs, qui en sont à diverses étapes de développement. L’une de mes grandes priorités consiste à mener à bien l’établissement de la majeure en études de la sexualité.

Plusieurs membres du corps professoral de Concordia, notamment l’ancienne directrice de l’institut, Geneviève Rail, et les professeurs Thomas Waugh et Frances Shaver, ont travaillé très fort à l’élaboration de ce nouveau programme; je suis persuadée que les étudiants de 1er cycle de Concordia l’apprécieront beaucoup et qu’il sera source de croissance pour l’institut.

Je collabore également avec mes collègues à la mise sur pied d’une maîtrise en recherche sociale spécialisée en études féministes.

L’Institut Simone-De Beauvoir cherche depuis longtemps à lancer un programme de maîtrise. Nos points forts se situant dans les domaines importants des études du militantisme, de la théorie féministe et des études liées à la race et au nationalisme, nous proposerons une formation unique aux étudiants de 2e cycle désireux de travailler dans le secteur public ou privé, ainsi qu’à ceux qui veulent poursuivre leurs études au niveau du doctorat.

En plus de ces programmes internes, nous tenons actuellement des discussions en vue de créer un nouveau centre de recherches multidisciplinaires : le Feminist Action in Research (FAIR) Centre for Policy Change.

Parmi les autres idées que nous étudions, notons la possibilité d’établir un programme de formation à l’analyse fondée sur le sexe et un programme de résidence pour érudits, militants et stratèges.

À votre avis, quel rôle l’institut jouera-t-il dans l’avancement de l’Université Concordia?

KM : L’Institut Simone-De Beauvoir est dans une position idéale pour aider l’Université à jouer pleinement son rôle d’établissement accessible offrant certaines des meilleures possibilités en matière de recherche, d’enseignement et d’initiatives communautaires en éducation supérieure de nos jours.

À titre de directrice, j’espère pouvoir faciliter l’adoption de notre mode de pensée et de nos pratiques féministes par la grande collectivité de Concordia. L’Université s’est déjà dotée de politiques (notamment un généreux congé parental et des garderies de qualité abordables) que lui envient bon nombre d’établissements similaires au Canada et aux États-Unis. Toutefois, il lui reste encore beaucoup à faire pour corriger les inégalités structurales qui existent en son sein.

Comment diversifier le corps professoral et la direction? Comment calmer les insécurités de nos professeurs non permanents? Comment soutenir nos étudiants de première génération afin qu’ils acquièrent les aptitudes professionnelles et critiques qui leur permettront de réussir avant et après l’obtention de leur diplôme?

J’espère qu’en traitant de ces questions, ainsi que d’autres, à travers un prisme féministe, nous pourrons faire de Concordia le premier établissement d’enseignement supérieur féministe en Amérique du Nord, afin qu’elle devienne une université nouvelle génération qui met la justice sociale au centre de sa mission et de ses pratiques.

Le 8 mars est la Journée internationale des femmes, mais malgré le fait que les femmes représentent 50 % des ministres fédéraux  et que le premier ministre canadien se dit féministe, il existe encore de nombreux stéréotypes et beaucoup de discrimination contre les femmes. À votre avis, les causes touchant les femmes progressent-elles au Canada, régressent-elles ou font-elles du surplace? Pourquoi?

KM : D’une certaine façon, nous en sommes à un moment de transformation remarquable. Depuis des années, des militants autochtones et leurs alliés tentaient d’obtenir une commission d’enquête nationale sur le meurtre et la disparition de femmes et de filles autochtones, et le gouvernement fédéral vient maintenant d’en lancer une.

Autre bonne nouvelle : la nouvelle ministre de la Justice, Jody Wilson-Raybould, s’est engagée à revoir les lois du gouvernement Harper sur la prostitution et à faire participer les travailleurs du sexe aux consultations.

Le premier ministre lui a également confié le mandat de présenter un nouveau projet de loi sur l’identité sexuelle, ce que de nombreux militants transgenres essayaient d’obtenir depuis plus d’une décennie, avec l’aide de leurs alliés.

Mais les changements aux lois ne suffiront pas à régler ces problèmes, ni d’ailleurs beaucoup d’autres. L’emprisonnement massif d’Autochtones des deux sexes au Canada, le racisme manifesté à l’endroit des musulmanes qui portent le hijab sur la voie publique et la récente décision de Québec de réduire le financement des garderies font ressortir que le « progrès » n’est peut-être pas entièrement atteint pour les Canadiennes.

On peut donc dire que dans de nombreux dossiers qui intéressent les féministes canadiennes, il y a des embellies par rapport à l’état de la situation six mois plus tôt, mais il ne fait aucun doute qu’il reste beaucoup de travail à faire.

Que répondriez-vous aux étudiants qui s’interrogent sur la valeur d’un diplôme en études des femmes?

Les professeurs qui enseignent à l’Institut Simone-De Beauvoir tiennent à offrir à leurs étudiants de 1er cycle les meilleures expériences d’apprentissage possibles.

Peu d’étudiants par classe, une bibliothèque et un centre d’apprentissage direct ainsi que des occasions d’intégrer la pratique à la théorie ne sont que quelques-uns des avantages que notre programme propose aux étudiants intéressés par ce champ d’études essentiel.

Les étudiants de 1er cycle s’inscrivent d’ailleurs en nombre croissant (une hausse de quelque 36 % au cours des trois dernières années), ce qui montre qu’un grand nombre d’entre eux comprennent l’importance des diplômes en études des femmes. Toutefois, nous savons également que les étudiants recherchent une préparation plus directe au monde qui les attendra lorsqu’ils seront diplômés.

Par conséquent, nous donnerons une nouvelle série d’ateliers dans le cadre des Workshops on Social Science Research l’hiver prochain; nous examinons en outre d’autres possibilités d’apprentissage qui permettront à nos étudiants de rencontrer des érudits, des stratèges et des militants à l’extérieur de Concordia.


Renseignez-vous sur l’
Institut Simone-De Beauvoir de l’Université Concordia.

 



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