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Les politiques d’adaptation aux changements climatiques de nombreux pays tiennent peu compte des droits de la personne, révèle une nouvelle étude de Concordia

Selon Alexandra Lesnikowski, les solutions aux problèmes liés aux changements climatiques adoptées par bien des États ne se préoccupent pas assez des personnes marginalisées.
28 novembre 2023
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Les autorités gouvernementales de nombreux pays débattent peu du lien entre les droits de la personne et les politiques d’adaptation aux changements climatiques, révèle une nouvelle étude dirigée par l’Université Concordia. Selon les chercheuses et chercheurs l’ayant menée, le sujet devrait figurer au premier plan de la conférence COP28, qui s’amorce cette semaine à Dubaï.

L’article a paru dans la revue Climate Policy. Professeure adjointe au Département de géographie, urbanisme et environnement de Concordia, Alexandra Lesnikowski a corédigé l’étude en collaboration avec une équipe de recherche de la Faculté de droit de l’Université McGill.

Leurs découvertes ne devraient pas surprendre les personnes qui suivront de près les négociations internationales sur le climat.

Aux fins de son étude, l’équipe a examiné les politiques d’adaptation climatique en vigueur dans 147 pays. Or, selon leurs conclusions, la plupart de ces politiques accordent peu d’importance – sinon aucune – aux droits de la personne.

« Si bon nombre des politiques nationales étudiées dégagent des facteurs structurels – la pauvreté et le genre par exemple – de la vulnérabilité climatique, à peine un tiers font référence de près ou de loin aux droits de la personne », indique la Pre Lesnikowski.

À première vue, les groupes vulnérables sont largement exclus des processus de planification et de prise de décisions. En fait, la moitié des États du monde n’ont encore adopté aucune mesure précise pour réduire cette vulnérabilité.

L’absence de mesures de responsabilisation étatique écarte toute possibilité de dédommager les groupes cherchant à obtenir réparation pour des préjudices subis à la suite de l’adoption de politiques d’adaptation climatique.

« Les pays signataires de l’Accord de Paris en 2015 se sont engagés à respecter et à promouvoir les droits de la personne dans leurs divers moyens de lutte contre les changements climatiques », rappelle la Pre Lesnikowski.

« Il y a maintenant huit ans que l’accord a été conclu, poursuit-elle. Nous sommes en droit de nous demander si les pays signataires respectent leur obligation d’admettre l’existence d’un lien entre les changements climatiques et les droits de la personne et si leurs politiques reflètent ces droits. »

« En définitive, nous n’avons pas constaté le niveau d’engagement espéré », déplore-t-elle.

Sébastien Jodoin, Jean-Philippe Lemay, Verity Thomson et Kasia Johnson de l’Université McGill ont participé à la rédaction de l’article.

Alexandra Lesnikowski porte des lunettes et une veste marron sur une chemise noire. « En définitive, nous n’avons pas constaté le niveau d’engagement espéré », souligne Alexandra Lesnikowski.

Importance de la situation géographique et du niveau de vie

L’équipe de recherche a observé que les États dont les politiques d’adaptation climatique faisaient mention des droits de la personne se trouvaient souvent dans la même région.

Ainsi, il était plus probable que des pays situés en Amérique latine, aux Caraïbes ou en Afrique subsaharienne incluent des dispositions sur les droits de la personne dans leurs politiques – ce qui n’était pas le cas dans la plupart des pays riches, exception faite du Canada et de la Norvège.

De plus, les renvois aux inégalités structurelles dans les politiques d’adaptation climatique variaient sensiblement d’un État à l’autre, et ce, en fonction de leur situation géographique et de leur niveau de vie.

Soixante-dix-huit pour cent des pays recensés dans l’ensemble de données comptaient au moins une politique reconnaissant l’incidence des inégalités structurelles sur la création d’une vulnérabilité associée aux changements climatiques. Comparativement aux autorités des pays industrialisés, celles des États non industrialisés ou en voie de développement étaient plus disposées à traiter des inégalités structurelles.

Les types d’inégalité les plus souvent cités dans les stratégies d’adaptation aux changements climatiques relevaient de catégories sociales (souvent liées à l’âge, en particulier pour les personnes très âgées ou très jeunes), économiques ou de genre. Les types les moins souvent mentionnés concernaient l’autochtonicité, les handicaps ou l’identité ethnique ou raciale.

Convergence d’intérêts

Selon la Pre Lesnikowski, les personnes marginalisées sur le plan économique, social ou politique souffrent davantage de problèmes de santé causés par les changements climatiques. Parmi elles figurent les agriculteurs de subsistance, les pauvres et les personnes âgées habitant un îlot de chaleur urbain.

« Nous avons aussi relevé de nettes tendances régionales quant au constat de la vulnérabilité particulière des autochtones aux changements climatiques. »

« Cette analyse met en évidence les écarts dans la répartition des communautés autochtones dans le monde et dans la reconnaissance qui leur est réservée à l’échelle nationale. »

Malgré l’absence d’un vocabulaire officiel des politiques d’adaptation climatique, la Pre Lesnikowski observe un intérêt croissant pour l’entérinement du rapport entre les changements climatiques et les droits de la personne.

« Un nombre croissant d’études examinent la nature des liens étroits existant entre les facteurs structurels de la vulnérabilité aux changements climatiques et les phénomènes de marginalisation, d’exclusion et d’oppression », affirme-t-elle.

« Tant le milieu de la recherche que la classe politique s’intéressent de plus en plus au rapprochement de ces deux questions », conclut-elle.

L’étude a été subventionnée par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada.

Lisez l’article cité (en anglais seulement) : « Human rights in climate change adaptation policies: a systematic assessment ».

Dr. Alexandra Lesnikowski: Adapting to a Changing Climate (anglais seulement)


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