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Nadia Naffi aide à garder une longueur d’avance sur l’intelligence artificielle

La diplômée en technologie éducative de l’Université Concordia forme les spécialistes d’aujourd’hui et de demain à utiliser l’IA à des fins positives.
25 avril 2024
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Par David Silverberg


« Si nous ne testons pas l’IA en milieu de travail, nous ne serons pas en mesure de prendre des décisions intelligentes sur la manière dont ces outils peuvent réellement nous aider et optimiser notre rendement », soutient Nadia Naffi.

Nadia Naffi, M.A. 2012, Ph. D. 2018, veut que l’on prenne l’intelligence artificielle (IA) très au sérieux. Professeure adjointe de technologie éducative et titulaire de la chaire de leadership en enseignement (CLE) sur les pratiques pédagogiques innovantes en contexte numérique – Banque Nationale à l’Université Laval (Québec), Mme Naffi considère que les vidéos hypertruquées (« deepfake ») qui se répandent dans les médias sociaux ne présagent rien de bon pour l’avenir.

« Nous arrivons à un stade où il est très difficile de savoir ce qui est réel et ce qui ne l’est pas, avance-t-elle. Dans le passé, nous savions que si nous voyions une vidéo, elle était réelle. Aujourd’hui, nous ne pouvons même plus nous fier à nos propres yeux, car la vidéo pourrait avoir été créée par l’IA. »

Bien que ses recherches se concentrent sur l’utilisation éthique et responsable de l’IA et des médias sociaux de même que sur les dangers de dérivés de l’IA tels que les vidéos hypertruquées, la Pre Naffi étudie également les applications bénéfiques possibles des technologies d’IA dans le domaine de l’éducation.

Elle explore aussi les façons dont le secteur des soins de santé pourrait se servir de l’IA pour améliorer les compétences des praticiennes et praticiens. Travailler avec la technologie leur permettrait d’offrir des soins plus efficaces. Dans le cadre de ses travaux au CHUM – notamment avec la Direction de l’enseignement et de l’Académie CHUM (DEAC) ainsi qu’avec l’École de l’intelligence artificielle en santé (ÉIAS) –, Nadia Naffi se penche sur les méthodes optimales de formation qui aideront le personnel à incorporer les applications d’IA à l’enseignement en santé.

« L’IA est en cours d’intégration dans l’espace médical, et mon partenariat avec la DEAC vise à assurer la formation continue des médecins, des infirmières et de l’ensemble du personnel médical et technique pour qu’ils puissent en exploiter les avantages », ajoute-t-elle.

L’IA aura de vastes répercussions dans les domaines de l’éducation, de la formation, du développement des talents ainsi que de l’amélioration des compétences et de la requalification des employés actuels et futurs, et s’y préparer est une importante source de motivation pour Nadia Naffi. « Si nous ne testons pas l’IA en milieu de travail, nous ne serons pas en mesure de prendre des décisions intelligentes sur la manière dont ces outils peuvent réellement nous aider et optimiser notre rendement », prévient-elle.

Elle estime également qu’il est nécessaire d’éduquer les jeunes sur les implications de l’IA. Dans une récente recherche qu’elle a menée sur les hypertrucages, elle a demandé à ses étudiantes et étudiants de créer leurs propres vidéos manipulées pour montrer à quel point cela était dangereux (et simple). Ils en ont tiré des recommandations qu’ils ont publiées sous forme d’articles dans The Conversation et le Journal of Constructivist Psychology.

Du Liban à Montréal

Nadia Naffi a grandi à Beyrouth, où elle a passé son enfance à se cacher des tireurs embusqués et des attentats à la voiture piégée. « Je me souviens d’avoir été une enfant dont l’objectif était toujours d’être en sécurité », raconte-t-elle.

Au début de sa vie d’adulte, elle a travaillé comme designer d’intérieur, mais s’est vite passionnée pour l’enseignement. Après s’être mariée en 2008 et avoir eu trois enfants, elle a décidé, avec sa famille, de partir pour le Canada. Comme elle parle couramment le français depuis son enfance, le Québec lui a semblé un choix judicieux.

Nadia Naffi est photographiée avec son doctorat de Concordia et ses certificats de la Médaille académique du Gouverneur général lors de la collation des grades de 2018.

Elle a obtenu une maîtrise et un doctorat en technologie éducative à Concordia, ce qui lui a permis d’apprécier la façon dont la technologie influe sur tant de domaines de la vie. Si la Pre Naffi a trouvé Concordia « très accueillante », son mari, qui ne parlait pas beaucoup français, a eu plus de mal au début à se trouver un emploi. Heureusement, eux et leurs enfants se sont rapidement adaptés à l’environnement montréalais, tant sur le plan social que météorologique. Nadia Naffi a ainsi pu se consacrer à sa maîtrise, explorant la façon dont les jeunes apprennent sur les médias sociaux.

« J’ai découvert que si nous responsabilisons les jeunes, ces derniers peuvent utiliser les médias sociaux de façon très productive et très responsable. Mais dans le système éducatif, ce n’est pas vraiment ce qui est activement recherché », note-t-elle.

Son doctorat, qui mettait en évidence l’importance de maîtriser les médias sociaux, se concentrait plus particulièrement sur l’impact de la propagande contre les personnes réfugiées syriennes qui émigrent au Canada. « Ce travail était très important pour moi, car je suis moi-même une immigrante », confie-t-elle. Au cours de ses études à Concordia, Nadia Naffi a reçu de nombreuses distinctions, dont le titre de chercheuse engagée en 2017, le prix du concours J’ai une histoire à raconter du Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH), le Prix du recteur pour le rayonnement médiatique et la Médaille académique du Gouverneur général –  Or.

En tant qu’experte des risques liés au contenu des médias sociaux, conseille-t-elle à ses propres enfants de ne pas utiliser ces plateformes? « Je n’ai jamais dit à mes enfants de ne pas aller sur Internet. Ma fille a un compte Instagram pour ses amis et je n’y ai pas accès. Et cela ne me dérange pas. Pourquoi? Parce que nous parlons de tout. Quand j’ai su qu’elle avait ce compte, je ne lui ai pas dit qu’elle n’avait pas le droit de l’utiliser, car elle aurait trouvé un moyen d’avoir ce qu’elle veut – les enfants sont comme ça. »

Ce que Nadia Naffi veut montrer à ses enfants – et à elle-même –, c’est que les chercheuses et chercheurs passionnés ne se contentent pas d’analyser les nuances de leur sujet : ils mettent aussi en application leurs découvertes afin d’améliorer leur propre vie.



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