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L’éducation a le pouvoir de contrer l’extrémisme et la radicalisation

25-27 SEPT. : L’Université Concordia accueille le troisième Symposium international sur l’enseignement en matière d’extrémisme, de terreur et de traumatisme
18 septembre 2017
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Par M. Ayaz Naseem and Adeela Arshad-Ayaz


M. Ayaz Naseem et Adeela Arshad-Ayaz | Photo par Concordia University M. Ayaz Naseem et Adeela Arshad-Ayaz | Photo par Concordia University

TETT 2017, le troisième Symposium international annuel sur l’enseignement en matière d’extrémisme, de terreur et de traumatisme, aura lieu du 25 au 27 septembre prochains à l’Université Concordia.

L’événement réunit des universitaires, des spécialistes et des praticiens œuvrant dans les domaines de l’extrémisme, du terrorisme, de la radicalisation et de la contre-radicalisation.

Le thème de la rencontre de cette année : Creating Learning Against Radicalization (CLEAR), c’est-à-dire « créer une culture d’apprentissage pour prévenir la radicalisation ».

Les organisateurs Ayaz Naseem et Adeela Arshad-Ayaz nous donnent un avant-goût du symposium dans ce texte d’opinion sur l’importance du rôle de l’éducation dans la lutte contre l’extrémisme.

La contre-radicalisation exige un changement de mentalité

Depuis les événements tragiques du 11 septembre 2001, les termes extrémisme, terrorisme et radicalisation sont devenus monnaie courante dans les discours public, médiatique et universitaire. La plupart des pays du monde, en plus de promulguer des lois pour contrer l’extrémisme, le terrorisme et la radicalisation, ont consacré à cette lutte d’énormes ressources.

À ce chapitre, le Canada ne fait pas exception, ayant affecté des ressources financières considérables au combat contre ces menaces, en plus d’instaurer une pléthore de lois visant à préserver la sécurité de la nation.

Les nouvelles mesures législatives adoptées pour garantir la sécurité de la population canadienne – par exemple le projet de loi C-13 (qui touche l’accès aux données personnelles par voie électronique), le projet de loi C-24 (qui permet de révoquer la citoyenneté canadienne des personnes condamnées pour terrorisme qui détiennent une double nationalité) et le projet de loi C-36 (imposant une détention pouvant aller jusqu’à 72 heures dans les cas de soupçon, sans autorisation préalable de la cour) – contreviennent aux libertés civiles.

En ce 16e anniversaire des attaques du 11 septembre, nous devons évaluer dans quelle mesure le monde parvient à composer avec les problèmes d’extrémisme, de radicalisation et de violence.

Nos efforts ont-ils contribué à rendre notre planète plus sûre aujourd’hui? Malgré l’engagement de sommes astronomiques et la prise d’importantes initiatives en matière de législation, les gouvernements du monde entier sont plus préoccupés que jamais quant à la sécurité des citoyens – et ces derniers sont plus inquiets que jamais quant à leur propre sécurité.

Des questions se posent d’emblée : Comment avons-nous tenté de contrer l’extrémisme et la radicalisation? Où avons-nous échoué? Qu’est-ce qui pourrait être fait différemment?

Une large part des initiatives en matière de contre-extrémisme et de contre-radicalisation sont fondées sur la perspective d’une sécurisation émanant du discours de la guerre au terrorisme, et sur l’hypothèse voulant qu’il n’y ait qu’une seule et unique source d’extrémisme de terreur et de radicalisation : le fondamentalisme religieux.

Toutefois, les efforts axés sur une telle perspective ou hypothèse ont échoué à garantir non seulement la paix et la sécurité à long terme, mais aussi la mise en place de moyens durables de prévenir l’extrémisme et la radicalisation, qu’ils soient d’origine locale ou autre.

Selon Reuters, « Le nombre d’attentats terroristes (…) a quadruplé », au cours de la décennie qui a suivi les attentats du 11 septembre. Ces deux dernières années, on a observé une hausse des actes extrémistes au Royaume-Uni, en France et dans d’autres pays d’Europe.

Par opposition à ce qu’on voyait durant les années qui ont immédiatement suivi le 11 septembre 2001, dans la plupart des cas récents de radicalisation, les acteurs ne sont pas des fanatiques religieux qui « infiltrent » l’Occident à partir du Moyen-Orient et de l’Asie du Sud, mais plutôt des citoyens de démocraties occidentales.

Ainsi, on constate aujourd’hui qu’une approche axée sur « la loi et l’ordre » doit être accompagnée de stratégies éducatives et sociales si l’on souhaite stopper et faire régresser la radicalisation.

Or, nombre d’initiatives éducatives actuelles sont encore très fortement orientées sur l’aspect sécurité du contre-extrémisme. Citons en exemple la stratégie Prevent, au Royaume-Uni, qu’on a accusé d’être contre-productive, et parfois de servir d’instrument d’espionnage, de contrôle et de criminalisation du comportement des jeunes dans les établissements d’enseignement.

Plutôt que de contribuer à inverser des tendances radicales, ce genre d’initiatives peut créer de plus grandes dissensions, qui, au bout du compte, auront pour conséquence de radicaliser un nombre encore plus grand de jeunes.

Dans la plupart des provinces canadiennes, il n’existe pas de projets éducatifs de contre-radicalisation (sauf en Alberta et, peut-être, au Québec). L’annonce, par le gouvernement libéral fédéral, de la création prochaine d’un bureau de coordonnateur de la sensibilisation des collectivités et de la lutte contre la radicalisation pourrait contribuer à stimuler les efforts en ce sens dans les secteurs communautaire et de l’éducation.

Toutefois, avant que de telles initiatives soient transposées en politiques, il importe de garder en tête qu’une démarche de contre-radicalisation axée sur la sécurisation est non seulement insuffisante, mais aussi contre-productive, notamment parce qu’elle amplifie le problème qu’elle est censée résoudre.

Toute solution durable pour contrer l’extrémisme et la radicalisation exigera un changement de mentalité. L’éducation peut jouer un rôle pivot dans la création de solutions viables à long terme, pourvu qu’on n’aborde pas le problème sous l’angle réducteur de la sécurisation.

En 2015, voulant contribuer à jeter les bases de programmes éducatifs de contre-radicalisation efficaces et durables, deux professeurs en sciences de l’éducation de l’Université Concordia ont lancé l’initiative TETT.

Tenu chaque année à Concordia, le Symposium international sur l’enseignement en matière d’extrémisme, de terreur et de traumatisme, ou TETT, se veut un espace de conversation sur l’extrémisme, le terrorisme, la radicalisation et la contre-radicalisation.

Il s’agit de créer des espaces éducatifs inclusifs et de favoriser l’échange d’idées entre le grand public et les acteurs qui prennent ou influencent les décisions, en l’occurrence les politiciens, les universitaires et les médias.

Au moment où les décideurs politiques du Canada commencent à pratiquer une « approche douce » pour contrer le fléau de l’extrémisme et de la radicalisation, il faut concevoir des politiques éducatives saines, fondées sur une connaissance approfondie des liens qui existent entre l’extrémisme et la violence, d’une part, et différentes formes d’injustice d’autre part.

Autrement, les initiatives en matière d’éducation risquent de passer à côté de la cible, occultant divers problèmes ou proposant inutilement des solutions extrêmes, entraînant ainsi de nouvelles formes de violence – comme la hausse abrupte des agressions à l’acide au Royaume-Uni.

Cela ne veut pas dire que la perspective fondée sur la sécurisation et l’attention portée à l’extrémisme religieux n’a pas d’importance. Toutefois, le fait de proposer strictement une approche axée sur la loi et l’ordre auprès de membres de certaines communautés religieuses peut avoir comme effet d’occulter d’autres sources de radicalisation ou de radicalisme.

Les établissements d’enseignement doivent pouvoir réaliser leur plein potentiel en tant qu’espaces aptes à favoriser des discussions multidimensionnelles et inclusives pour prévenir l’extrémisme et la radicalisation.

Le directeur du Symposium international sur l’enseignement en matière d’extrémisme, de terreur et de traumatisme, M. Ayaz Naseem, est professeur au Département des sciences de l’éducation de l’Université Concordia. La codirectrice du symposium, Mme Adeela Arshad-Ayaz, est professeure agrégée au même département.

L’événement TETT 2017 a lieu du 25 au 27 septembre 2017, à l’Université Concordia. Inscrivez-vous dès maintenant.



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