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Article de blog

Aviation : il faut accroître la visibilité des femmes

L’industrie aéronautique fait souvent l’objet de critiques ayant trait aux inégalités entre les sexes qui y sévissent. Pourquoi est-il donc si difficile d’assurer l’égalité des chances dans ce secteur d’activité?

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Malgré les nombreux efforts déployés, la parité entre les femmes et les hommes dans le domaine de l’aviation n’est toujours pas chose faite. L’industrie reste pour ainsi dire la chasse gardée de la gent masculine. À preuve, un nombre infinitésimal de femmes occupent un poste technique : pilote, mécanicienne d’aéronefs, vérificatrice d’avions, contrôleuse aérienne ou ingénieure, par exemple. Pourtant, ce n’est pas faute d’essayer. Quantité de grandes organisations mettent en œuvre d’excellentes initiatives pour encourager les femmes à intégrer ce secteur d’activité. Toutefois, il faudrait peut-être compter davantage sur la rétention – plutôt que l’attraction – des femmes en aéronautique et sur l’exposition plus précoce de celles-ci au domaine pour développer de telles initiatives et leur conférer plus d’efficacité.  

Faits et chiffres  

Ces 25  dernières années, le nombre d’inscriptions de femmes à des programmes universitaires de génie n’a cessé d’augmenter – tout particulièrement aux deuxième et troisième cycles. Par contre, environ 40 % des femmes inscrites en génie ne terminent pas leur cursus ou ne travaillent jamais dans cette discipline. Cette information est tirée d’une conférence qu’a donnée en 2014 Nadya A. Fouad, Ph. D., dans le cadre du colloque annuel de l’American Psychological Association (« association américaine de psychologie »).

Je n’avais pas envisagé l’idée de faire carrière en génie, car je croyais que ce domaine était réservé aux premiers de classe en mathématiques, en physique et en technologie, explique-t-elle. Jamais je n’aurais pensé que la pratique et l’expérience permettaient de se familiariser avec ces disciplines. 

Publié en mars 2018 par le Conseil canadien de l’aviation et de l’aérospatiale, le Rapport d’information sur le marché du travail indique que les femmes exercent 30 % des emplois dans ces industries. Toutefois, lorsque les postes administratifs sont exclus et que seuls les postes techniques sont considérés, cette donnée se situe alors invariablement en deçà de 10 %. Selon l’article Minding the Gap: Women in Aviation (« attention à l’écart : l’aviation au féminin ») paru dans Skies Magazine, en 2018, les femmes occupaient seulement 15 % des emplois en contrôle aérien au pays et ne formaient que 18,7 % de l’effectif total de l’Aviation royale canadienne (ARC). Même s’ils semblent peu importants, ces taux n’en demeurent pas moins parmi les plus élevés que l’industrie n’ait jamais connus.

Andrea Cartile Andrea Cartile; Crédit photo: Emily Fjeldsted

Facteurs dissuasifs 

Au moment d’effectuer un choix de carrière, les jeunes femmes ignorent souvent quelles vastes possibilités offre l’industrie aéronautique. Doctorante en génie aérospatial à l’Université Concordia, Andrea Cartile affirme que, somme toute, cette description lui correspond. « Je n’avais pas envisagé l’idée de faire carrière en génie, car je croyais que ce domaine était réservé aux premiers de classe en mathématiques, en physique et en technologie, explique-t-elle. Jamais je n’aurais pensé que la pratique et l’expérience permettaient de se familiariser avec ces disciplines. » En définitive, elle a opté pour des études en génie précisément parce que cela lui posait un défi. L’apprentissage formant l’un des buts de l’éducation, il convient de souligner que nul ne s’attend à ce que vous soyez un as en technologie avant même d’entamer un cursus dans un domaine comme l’aéronautique. « Si vous avez envie d’apprendre le fonctionnement des choses et faites preuve d’un peu de persévérance, vous aurez l’occasion de vous destiner à plusieurs professions en génie », signale Andrea Cartile. Ce point revêt une importance particulière pour les femmes. En effet, comparativement aux hommes, elles ont moins de chances d’être initiées à cette industrie et encouragées à y faire carrière.

Les nations peuvent cependant convenir de la mise en œuvre d’un plan de promotion de l’aéronautique auprès des filles et des femmes, soutient-elle. Elles peuvent aussi aspirer à un objectif de croissance commun au monde entier.

Stephanie Fiore Stephanie Fiore

Répercussions à l’échelle internationale 

Selon Stephanie Fiore, étudiante de premier cycle en génie à l’Université Concordia, l’inégalité de genre dans le secteur de l’aviation représente un problème d’envergure planétaire. À la fin de son secondaire, en Italie, elle n’a pas été vraiment encouragée à effectuer des études en aéronautique. Cette dissuasion reposait en partie sur le caractère compétitif de l’industrie italienne. Mais Stephanie  Fiore y voit une autre raison : le sexe auquel elle appartient. « Je suis une femme, donc il y aura des difficultés, illustre-t-elle. On nous fait un peu moins confiance. » Cette vérité l’a incitée à déménager à Montréal et à y poursuivre des études postsecondaires. À son avis, les femmes ayant choisi de travailler dans le domaine de l’aviation peuvent gérer plus facilement la situation dans la métropole québécoise – notamment parce qu’il s’agit d’un pôle important de l’industrie aéronautique. Cette réalité entraîne la question suivante : dans ce secteur, comment parvenir à faire de l’égalité une priorité mondiale?

Nadia Bhuiyan Nadia Bhuiyan

Selon Nadia Bhuiyan, vice-rectrice exécutive adjointe aux partenariats et à l’apprentissage expérientiel et professeure de génie mécanique, industriel et aérospatial à l’École de génie et d’informatique Gina-Cody de l’Université Concordia, des différences se manifesteront d’un pays à l’autre en fonction des ressources disponibles. « Les nations peuvent cependant convenir de la mise en œuvre d’un plan de promotion de l’aéronautique auprès des filles et des femmes, soutient-elle. Elles peuvent aussi aspirer à un objectif de croissance commun au monde entier. » 

La diversité est nécessaire à toute industrie, car elle fournit des perspectives, des connaissances, des compétences et des expériences de vie variées.

Mesures d’atténuation 

La société dans son entièreté doit chercher à atteindre l’égalité entre les sexes dans le secteur de l’aviation. Statistiques à l’appui, les travailleuses des domaines techniques risquent plus de se voir confier des tâches d’ordre administratif ou organisationnel. Pour Andrea Cartile, il importe que les femmes aient bien conscience de cet état de fait. Elle affirme quant à elle assumer sa part de responsabilité en poursuivant ses études. « À titre de personne s’identifiant au genre féminin, la connaissance de statistiques susceptibles de refléter ma réalité m’aidera à mieux décider s’il me convient ou non d’exécuter telle ou telle tâche », explique-t-elle. 

Par ailleurs, il est crucial que l’industrie accorde aux femmes leur juste place. Elles pourront ainsi contribuer à l’amélioration des milieux de travail, et ce, à tous les échelons de la hiérarchie. Si l’industrie examinait ses pratiques internes dans l’objectif de recentrer ses efforts en vue de fidéliser les femmes plutôt que de se borner à les attirer, une meilleure représentation féminine aux postes de direction fournirait des modèles de parcours professionnels aux nouvelles venues dans le domaine. « La diversité est nécessaire à toute industrie, car elle fournit des perspectives, des connaissances, des compétences et des expériences de vie variées », soutient Nadia Bhuiyan. 

Surtout, il est essentiel que les femmes se familiarisent très tôt avec les domaines techniques, notamment l’industrie aéronautique. L’exemple de Stephanie Fiore en témoigne parfaitement. Malgré le vif intérêt qu’elle portait depuis toujours à l’aérospatiale, elle ne pensait pas qu’il y avait là de réelles possibilités d’emploi pour elle. Toutefois, à 15 ans, elle assiste à une conférence donnée par la première femme astronaute. « À ce moment-là, j’ai pris conscience que je pourrais faire carrière en aérospatiale ou en aviation », raconte-t-elle. Cette expérience marquante représente un véritable tournant dans son cheminement professionnel. En effet, Stephanie Fiore avait d’abord envisagé d’étudier la psychologie – simplement parce que cette discipline correspondait davantage à ce qui était « attendu » d’elle. Ce jour-là, elle a suivi une conférence par hasard plutôt que dans une perspective pédagogique ou sectorielle, mais le simple fait de voir qu’une femme exerçait une profession qu’elle-même ne croyait pas pouvoir pratiquer a changé le cours de sa vie.  

« Il ne s’agit pas de vouloir accroître la présence des femmes en aéronautique seulement pour qu’elles y soient plus nombreuses, conclut Nadia  Bhuiyan. À mon avis, l’initiation des filles dès leur plus jeune âge à l’aviation constitue le véritable enjeu. En effet, c’est par ce moyen qu’elles réaliseront que ce choix de carrière est parfaitement valable tant pour les femmes que pour les hommes et que les chances de succès sont les mêmes pour tous. » 

> Regardez la table ronde du 10 mars 2020 sur les femmes dans l'aviation

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