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Les bébés bilingues préfèrent le langage enfantin – surtout lorsqu’il s’agit d’une de leurs langues premières, indique une nouvelle étude menée à Concordia

Krista Byers-Heinlein dirige un consortium international de recherche visant à mieux comprendre le développement précoce du langage.
23 mars 2021
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Man reading to baby
Photo par Picsea via Unsplash

Peu importe leur langue, les bébés préfèrent le langage enfantin, mais ils en raffolent tout particulièrement lorsqu’il est associé à la langue qu’ils entendent à la maison.

Une étude unique en son genre menée auprès de centaines de bébés dans dix-sept laboratoires disséminés sur quatre continents montre que les enfants du premier âge réagissent davantage si on leur parle bébé – si on emploie un langage enfantin avec eux – que si on leur tient un langage d’adulte. L’étude révèle aussi que des nourrissons de six mois à peine peuvent distinguer les différentes langues utilisées dans leur environnement.

« Nous avons pu comparer des bébés issus de familles bilingues à d’autres vivant en milieu unilingue », explique Krista Byers-Heinlein, chercheuse principale et professeure agrégée de psychologie à la Faculté des arts et des sciences. « Ce qui semblait importer le plus était la correspondance entre la langue qu’ils entendaient dans leur environnement quotidien et la langue que nous leur faisions écouter dans le cadre de l’étude. » Les résultats de celle-ci ont fait l’objet d’un article dans la revue Advances in Methods and Practices in Psychological Science.

Krista Byers-Heinlein, smiling woman wearing black cardigan and floral shirt « Plus les bébés connaissent une langue, plus ils aiment qu’on leur parle en langage enfantin », affirme Krista Byers-Heinlein.

Je regarde, donc j’écoute

Cette étude est l’une des premières que publie le consortium ManyBabies, un projet de collaboration quinquennal réalisé sur une base entièrement bénévole par un groupe de chercheuses et chercheurs des quatre coins du monde. La recherche – qui s’est déroulée simultanément dans des laboratoires canadiens, américains, européens, australiens et singapouriens – s’appuie sur l’examen de centaines de bébés, plus précisément 333 bilingues et 385 unilingues, âgés de six à quinze mois.

Bien que le recrutement et l’examen des sujets relevaient de chaque laboratoire, il y avait des dénominateurs communs à tous les groupes participants. Ainsi, une des deux langues des bébés bilingues devait correspondre à celle des bébés unilingues. De plus, les laboratoires devaient tous employer la même procédure d’examen. Enfin, les enfants étaient séparés en deux groupes : nourrissons de six à neuf mois, d’une part; tout-petits de douze à quinze mois, d’autre part.

Les membres de l’équipe de recherche ont fait entendre à chaque bébé des cassettes audio préenregistrées reproduisant la voix de mères anglophones parlant bébé, puis utilisant un langage d’adulte. Par la suite, ils ont mesuré la durée du regard que posait chaque bébé pendant que jouaient les cassettes.

« Le fait qu’ils regardent implique qu’ils écoutent », souligne la Pre Byers-Heinlein, qui dirige aussi le Laboratoire de recherche sur l’enfance de Concordia.

Les bébés ne venaient pas tous de familles d’expression anglaise. Grâce au caractère international de l’étude, de nombreuses combinaisons linguistiques étaient représentées. Cela dit, tous les enfants préféraient entendre un anglais enfantin plutôt qu’un anglais d’adulte, et ce, peu importe leur langue première. Par ailleurs, les nourrissons issus de foyers où l’anglais était parlé portaient encore plus d’attention aux propos tenus en langage enfantin.

« Plus les bébés connaissaient la langue, plus ils aimaient qu’on s’adresse à eux en langage enfantin, précise la Pre Byers-Heinlein. Ainsi, les nourrissons qui, à la maison, entendaient parler anglais les trois quarts du temps affichaient une préférence plus marquée que ceux qui vivaient dans un foyer où l’anglais n’était utilisé que dans une proportion de 25 %. »

Une nouvelle façon de réaliser une recherche

Pour la Pre Byers-Heinlein, ManyBabies est bien plus qu’un passionnant projet de recherche. En effet, elle y voit un exemple de coopération internationale des plus innovants, où des collègues imaginent des possibilités de collaboration transcendant les différences en matière de lieu, de langue et de ressources.

Le travail de recrutement et d’examen des bébés s’est effectué indépendamment dans chacun des dix-sept laboratoires participants. La structure non hiérarchisée du consortium assurait aux chercheuses et chercheurs la flexibilité nécessaire à la poursuite de leurs travaux dans l’optique qui leur convenait le mieux. Comme les activités de recrutement se déroulaient parallèlement dans les divers laboratoires, les chercheuses et chercheurs avaient accès à un ensemble de données d’une rare richesse.

Pour la Pre Byers-Heinlein, cette approche inédite permet de mettre la théorie à l’épreuve. À son avis, le consortium pourra s’appuyer sur l’expérience acquise dans le cadre de ce projet de recherche mené dans dix-sept laboratoires aux quatre coins du monde pour ultérieurement soulever et examiner d’autres questions.

« Grâce à l’accès dont nous bénéficions à diverses communautés, nous pouvons vraiment faire progresser notre compréhension du bilinguisme – et plus particulièrement de la variabilité du bilinguisme », conclut-elle.

Lisez l’article cité : A multi-lab study of bilingual infants: Exploring the preference for infant-directed speech.



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