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Une chercheuse de l’Université Concordia étudie l’incidence des changements climatiques sur les cycles de gel et de dégel au Québec

Les effets sur les conditions du sol peuvent causer des dégâts aux cultures, affaiblir les infrastructures et augmenter les émissions de gaz à effet de serre, affirme Shadi Hatami
13 janvier 2020
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Shadi Hatami : « Les cycles de gel et de dégel sont l’une des caractéristiques géologiques les plus importantes des régions froides. »
Shadi Hatami : « Les cycles de gel et de dégel sont l’une des caractéristiques géologiques les plus importantes des régions froides. »

Au Canada, le climat se réchauffe à un rythme deux fois plus élevé que le reste de la planète, et les hivers à Montréal ne sont plus ce qu’ils étaient. Les fluctuations de température ont des conséquences beaucoup plus graves que la gadoue qui baigne souvent les trottoirs ou le piètre état des patinoires extérieures.

Shadi Hatami est candidate au doctorat en gestion des ressources en eau au Département de génie du bâtiment, civil et environnemental de l’École de génie et d’informatique Gina-Cody de l’Université Concordia. À son avis, les changements climatiques ont une incidence considérable sur les cycles de gel et de dégel du sol au Québec et ailleurs. En étudiant divers ensembles de données couvrant les quatre dernières décennies, elle a montré que de nombreux secteurs – agriculture, extraction minière, routes, chemins de fer, etc. – en subissent les conséquences.

Les cycles de gel et de dégel influent également sur d’importants processus environnementaux, tels que les émissions de gaz à effet de serre

Une chercheuse de l’Université Concordia étudie l’incidence des changements climatiques sur les cycles de gel et de dégel au Québec

Quel est le rapport entre cette image et vos travaux à Concordia?

Shadi Hatami : Mes travaux de recherche visent à déterminer l’incidence des changements climatiques sur les cycles de gel et de dégel de la masse terrestre du Canada. Cette image, réalisée à l’aide de photos satellitaires et de données climatiques de la NASA, montre dans quelle mesure la hausse des températures au Québec a réduit le nombre de jours de gel des sols durant une année type.

Le panneau de gauche indique le taux de variation de la température annuelle, et on constate que de 1979 à 2016, la température moyenne au Québec a augmenté de 1,2 degré Celsius. Le panneau du centre indique la corrélation statistique entre la température annuelle et le nombre de jours de gel durant l’année. On constate que le réchauffement de la température se traduit par une diminution du nombre de jours durant lesquels le sol est gelé.

Compte tenu du degré élevé de corrélation entre ces deux variables, la durée des périodes annuelles de gel au Québec a diminué d’environ 12 jours en moyenne, comme l’indique le panneau de droite. Les conséquences sont énormes pour les processus environnementaux et les activités humaines.

Quels résultats attendez-vous de vos travaux?

SH : L’objectif principal de mon étude est de déterminer l’effet des perturbations des variables climatiques à long terme sur les cycles de gel et de dégel au Canada. Pour cela, je dois caractériser la corrélation statistique entre les cycles de gel et de dégel et les variables climatiques pertinentes, telles que la température et les précipitations, puis déterminer de quelle façon cette corrélation peut varier selon le lieu et l’épisode temporel.

Nous nous sommes d’abord intéressés au Québec, mais nous comptons étendre notre étude à d’autres régions du Canada.

Selon vous, quelles seront les retombées de vos travaux sur la vie des gens?

SH : Les cycles de gel et de dégel figurent parmi les caractéristiques géologiques les plus importantes des régions froides comme le Canada. Depuis toujours, ils déterminent la façon dont les activités socioéconomiques se développent au pays, de l’agriculture à l’extraction minière en passant par la conception et l’exploitation d’infrastructures importantes comme les routes et les chemins de fer.

Par exemple, le gel du sol contribue à la stabilité des résidus miniers, tandis que le dégel est indispensable à l’agriculture. Par contre, les nombreuses oscillations entre le gel et le dégel peuvent causer des dégâts aux cultures, soumettre les structures en béton à des tensions et réduire la durée de vie des bâtiments, des ponts et des routes. Tout cela peut coûter des milliards de dollars aux contribuables.

De plus, les cycles de gel et de dégel influent à long terme sur d’importants processus environnementaux, tels que les émissions de gaz à effet de serre dans les régions froides. Avec le prolongement des périodes de dégel, le sol émet des milliers de tonnes supplémentaires de méthane et de carbone dans l’atmosphère, ce qui accentue l’effet des changements climatiques en cours à l’échelle mondiale.

Quels sont les principaux obstacles auxquels vous vous heurtez dans le cadre de vos travaux de recherche?

SH : Le premier obstacle est de trouver des données fiables et de bonne qualité pour soutenir nos travaux. Nous utilisons les données satellitaires sur le gel et le dégel ainsi que les données de réanalyse disponibles à l’échelle mondiale. Toutefois, ces données peuvent manquer de fiabilité à certains endroits, en particulier dans les régions nordiques. De plus, le couplage d’ensembles de données provenant de différentes sources peut se révéler assez compliqué.

Un autre obstacle concerne la conception d’un cadre mathématique qui représenterait la corrélation entre les caractéristiques du climat et celles des cycles de gel et de dégel. Ce type de cadre peut être difficile à trouver, et il faut parfois déterminer les principes méthodologiques de base – une tâche qui peut se révéler complexe.

Qu’est-ce qui vous a donné l’idée de vous pencher sur ce sujet?

SH : À titre d’ingénieure civile spécialisée en ressources hydriques et environnementales, j’aspire à mieux comprendre les questions liées à l’environnement, notamment l’effet des changements climatiques sur la vie humaine et les écosystèmes.

Il existe de nombreux travaux sur les répercussions des changements climatiques sur les variables hydroclimatiques comme la température, les précipitations et le courant. Jusqu’ici toutefois, peu de chercheurs se sont vraiment intéressés au gel et au dégel des sols. Comme je l’ai mentionné plus tôt, le gel et le dégel des sols peuvent avoir des répercussions concrètes sur les infrastructures civiles, en particulier dans un pays froid comme le Canada. J’aimerais que grâce à ma contribution, les Canadiens puissent avoir un avenir meilleur.

Quel conseil donneriez-vous aux étudiantes et étudiants qui aimeraient s’investir dans ce champ de recherche?

SH : Les occasions de recherche sont nombreuses dans les domaines des changements climatiques et de l’hydrologie. La meilleure façon de commencer consiste peut-être à s’informer sur les différents domaines de recherche en assistant à des conférences et en consultant davantage les médias spécialisés et les revues scientifiques. Les étudiants devraient aussi s’attacher à élargir leurs connaissances en mathématiques et en programmation informatique.

Je leur conseillerais aussi de prendre contact avec des groupes de recherche œuvrant dans ces domaines et d’assister à leurs réunions. Par exemple, notre laboratoire organise de nombreuses conférences chaque année. Lorsqu’ils assistent à ce genre d’activités, les étudiants peuvent en apprendre beaucoup sur les sujets brûlants et rencontrer des acteurs importants de leur domaine.

Qu’est-ce qui vous plaît le plus à Concordia?

SH : Mes études de doctorat à Concordia ont beaucoup contribué à ma croissance personnelle et professionnelle. J’aimerais remercier mon superviseur, Ali Nazemi, ainsi que mes collègues et les autres membres du corps professoral qui m’ont guidée et encadrée durant mon parcours.

Jusqu’à maintenant, j’ai eu de nombreuses possibilités de participer à des ateliers et à des conférences, et j’ai fait connaissance avec d’autres scientifiques qui s’intéressent aux mêmes sujets que moi. Cette visibilité m’a été utile, car elle m’a aidée à gagner le prix de la meilleure communication étudiante, remis lors de la conférence annuelle 2019 de la Société canadienne de génie civil, à Laval, au Québec. Fait cocasse, j’ai aussi rencontré l’être cher à Concordia, dans le même laboratoire.

Vos recherches bénéficient-elles du financement ou du soutien de partenaires ou d’organismes?

SH : J’aimerais remercier mon superviseur pour le soutien qu’il m’a apporté durant mes dernières années d’études par l’intermédiaire du Fonds de recherche du Québec – Nature et technologies. Je remercie également l’Université Concordia pour la générosité dont elle a fait preuve en m’accordant une bourse d’excellence pour étudiants internationaux ainsi que plusieurs bourses de conférence et d’exposition. J’ai en outre reçu des bourses de l’École de génie et d’informatique Gina-Cody.


Apprenez-en davantage sur le Département de génie du bâtiment, civil et environnemental de Concordia.



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