En matière d’édition génique, Steve Shih ne craint pas de voir grand – même si cela implique qu’il doit travailler dans l’infiniment petit.
Son objectif ne saurait être plus ambitieux : il veut éradiquer le cancer! Or, il croit que ses étudiants et lui ont fait une importante découverte qui les rapproche un peu plus de ce but.
Professeur adjoint de génie informatique et électrique à la Faculté de génie et d’informatique de l’Université Concordia et titulaire d’une seconde affectation en biologie, M. Shih a par ailleurs fondé le laboratoire de microfluidique Shih.
Épaulé par son équipe, il a conçu un système qui s’appuie sur l’automatisation d’expériences biologiques complexes afin de détecter les gènes associés au cancer et de les éliminer avant qu’ils n’induisent une maladie potentiellement mortelle.
Un article paru en juillet dernier dans la revue Lab on a Chip (« laboratoire sur puce ») expliquait le fonctionnement du système.
« D’entrée de jeu, l’identification des gènes liés au cancer représente une tâche des plus ardues », affirme le Pr Shih.
« Avec les moyens dont nous disposons actuellement, autant chercher une aiguille dans une botte de foin, poursuit-il. Par contre, j’ai bon espoir que cette méthode novatrice nous permettra d’accélérer le processus dans son ensemble et de repérer rapidement les gènes responsables de la maladie. »
Cela dit, localiser ces gènes, c’est une chose; les empêcher de causer le cancer, c’en est une autre.
Pour y arriver, l’équipe du Pr Shih emploie la technique d’édition génique des CRISPR (Clustered Regularly Interspaced Short Palindromic Repeats; « courtes répétitions palindromiques groupées et régulièrement espacées »). Ce procédé s’appuie sur la protéine Cas9 qui, programmée pour servir de « ciseaux génétiques », cible l’oncogène, l’élimine pour ainsi dire de l’ADN et lui substitue un gène sain.
« Une fois ses deux extrémités coupées, le gène se dégrade jusqu’à disparaître de l’organisme », précise le Pr Shih.
« Ce gène ne pourra donc plus emprunter une trajectoire susceptible de provoquer le cancer, ajoute-t-il. Il serait très difficile de réaliser cette expérience sur une plateforme typique. En effet, nous devrions alors composer avec des techniques statiques exigeant diverses interventions manuelles. »
« En automatisant le processus et en travaillant à une échelle miniaturisée, nous parvenons à accélérer l’ensemble du processus, conclut-il. À preuve, celui-ci ne se déroule plus sur des semaines, mais sur quelques jours. »
Attachés au Centre de biologie synthétique appliquée de Concordia, Hugo Sinha, Angela Quach, Philippe Vo et Steve Shih ont rédigé l’article susmentionné après avoir formulé la première méthode de microfluidique numérique et automatisé ainsi l’édition génique déployée dans des cellules de mammifères.
Étalée sur six jours ou moins, cette méthode sous-tend l’utilisation d’infimes quantités de liquide dans la culture de cellules du cancer du poumon. Parallèlement, elle automatise la transfection de gènes et les procédés d’invalidation connexes.
Le processus d’automatisation et de miniaturisation intégré que les chercheurs précités ont mis au point leur fait gagner énormément de temps, d’une part, et accroît légèrement l’efficacité du procédé d’invalidation génique, d’autre part.