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Le bitcoin : tant de risques pour si peu de valeur

Dans une récente lettre d’opinion, le professeur de Concordia David Morris affirme que la cryptomonnaie est une bulle spéculative énergivore et pétrie de méfiance
3 octobre 2018
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Par Patrick Lejtenyi


Cryptomonnaie la plus importante et la plus connue, le bitcoin a toujours été enveloppé de mystère – d’ailleurs, on ne sait toujours pas qui l’a vraiment inventé. Toutefois, d’après bon nombre d’analyses, le bitcoin est peu pratique à utiliser comme monnaie, sa production exige une quantité d’énergie faramineuse, et sa valeur est en train de s’effondrer.

David Morris, professeur au Département de philosophie de l’Université Concordia, est d’accord avec ces points et explique que le bitcoin se fonde sur la méfiance envers les êtres humains, les institutions et les gouvernements.

Dans une récente lettre d’opinion publiée par le journal académque AI & Society, M. Morris soutient qu’il faut une énorme quantité d’énergie pour créer cette monnaie grâce à laquelle on peut éviter d’accorder sa confiance aux banques, aux gouvernements et à autrui.

Le bitcoin est un système qui fonctionne sans tiers de confiance. Les détails peuvent être difficiles à comprendre, mais en gros, ce système est basé sur des calculs complexes (le « minage ») qui permettent de valider et d’approuver les transactions. Au lieu de dépendre de la confiance d’une personne, celles-ci sont donc protégées grâce à de considérables dépenses d’énergie et temps de calcul.

D’après certaines études, le minage de bitcoin requiert presque autant d’énergie que l’Irlande (dont la population est de 4,8 millions d’habitants), et cela va en augmentant.

« C’est du gaspillage pur et simple », déplore David Morris.

Ce gaspillage engendre par ailleurs d’autres problèmes. Les coûts énergétiques du bitcoin poussent les mineurs à rivaliser pour trouver des modes de minage plus économiques. Or, cela n’est pas souhaitable, car un consortium de minage qui finirait par dominer les autres pourrait tricher. Ainsi, les coûts énergétiques du bitcoin doivent sans cesse augmenter.

Le gaspillage donne également lieu à « un marché consacré à la production de la monnaie même », ajoute le professeur Morris.

« Parallèlement, comme le bitcoin n’est pas directement lié à la productivité économique ou aux contribuables, la spéculation peut devenir très intense, avec une monnaie dont la valeur monte et descend en flèche. Je ne pense pas que quiconque ait vraiment pensé à la manière dont fonctionneraient tous les rouages du système. »

David Morris | Photo by Concordia University David Morris | Photo by Concordia University

Entre-temps, les calculs nécessaires pour protéger les transactions de bitcoins se font en pure perte. La technologie est utilisée à contre-courant de la façon dont l’humanité progresse normalement.

« Tout au long de l’histoire de l’humanité, » poursuit le professeur Morris, « le traitement des nombres et de l’information a généralement gagné en efficacité énergétique. Or, le système Bitcoin va à l’opposé. Il utilise les nombres à une fin pour laquelle ils ne sont pas conçus. »

La spéculation et les coûts énergétiques ont changé la nature même du bitcoin qui, selon David Morris, n’a jamais vraiment été efficace en tant que monnaie. « Le nombre de transactions de bitcoins par minute, par exemple, est inférieur de plusieurs ordres de grandeur à celui des compagnies de cartes de crédit. »

En outre, les coûts énergétiques poussent les mineurs à accroître leurs frais de transaction, puisqu’ils veulent se maintenir à flot tout en payant leurs frais généraux d’électricité.

De plus, le bitcoin est passé de l’état de moyen d’échange à celui de véhicule pour stocker de la valeur, comme l’or. « Cela accroît la vulnérabilité, favorise la spéculation et peut mener à l’éclatement de bulles spéculatives », prévient M. Morris.

Le professeur apprécie néanmoins une chose du bitcoin : son élégance mathématique. Mais à quoi bon cette élégance, déplore-t-il, si elle engendre un tel gaspillage?

« Il me semble étrange de faire cela à notre planète à l’heure actuelle, » conclut-il. « Vu de l’extérieur, c’est comme si on agissait ainsi par manque de confiance envers les êtres humains et les institutions, alors on préfère épuiser nos ressources et la planète. C’est très contradictoire. »


Apprenez-en davantage sur les recherches menées à Concordia.

Relations médias

Patrick Lejtenyi
Conseiller Affaires publiques 
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