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Communiqué de presse

Que peut nous enseigner le chien de Pavlov sur la consommation d’alcool?

Boire dans des verres sophistiqués pourrait favoriser la dépendance à l’alcool, selon des chercheurs de l’Université Concordia

Montréal, le 25 mai 2016 — Les humains ne sont pas très différents des autres animaux. Tout comme le chien de Pavlov, nous pouvons en venir par conditionnement à associer stimuli environnementaux et récompenses. Si le fait d’apercevoir vos chaussures de course vous donne le goût d’aller piquer un sprint, c’est sans grave conséquence. Toutefois, cela devient un problème si la seule vue d’un magasin de vins et spiritueux vous donne envie de boire.

En effet, les signaux pavloviens qui prédisent la consommation d’alcool peuvent nous mener à la dépendance. Qui plus est, dans certains cas, ces stimuli peuvent en soi devenir attrayants. C’est ce que des chercheurs de l’Université Concordia, à Montréal, ont démontré dans une nouvelle étude dont le compte rendu a été publié dans la revue Frontiers in Behavioral Neuroscience.

« La dépendance à l’alcool est aggravée par notre capacité d’apprendre à partir d’indices prédictifs », affirme Nadia Chaudhri, professeure au Département de psychologie et auteure principale de l’étude. 

« Les réactions conditionnées aux signaux peuvent déclencher des comportements qui mènent à la consommation d’alcool – entrer à la SAQ ou aller chercher une bière, par exemple. »

D’après les résultats de l’étude, les signaux prédictifs de consommation d’alcool peuvent devenir en eux-mêmes très attirants. Ainsi, des gens peuvent continuer de boire à cause du plaisir qu’ils retirent de leurs interactions avec ces signaux.

Par conséquent, les buveurs qui souhaitent changer leurs habitudes devraient axer leurs efforts non seulement sur les boissons alcoolisées, mais aussi sur tous les facteurs entourant leur consommation.

« Bien des gens possèdent des verres spécialement conçus pour différents types d’alcools et affichent de fortes préférences pour certaines boissons », indique la Pre Chaudhri.

« Ces préférences pourraient être induites par les propriétés sensorielles de l’alcool, comme le goût, l’odeur et l’apparence. Les gens doivent réaliser à quel point la consommation d’alcool est un phénomène complexe. Ils doivent aussi savoir reconnaître les effets de l’alcool sur le cerveau et son rôle dans la régulation de nos comportements. »

Pour les besoins de leurs travaux, la Pre Chaudhri et ses coauteurs – Chandra Srey, ancienne étudiante à Concordia, et Jean-Marie Maddux, chercheur postdoctoral – ont étudié 25 rats de laboratoire. Les animaux ont été conditionnés pour associer un signal précis à la présence d’éthanol – le principal type d’alcool trouvé dans les boissons alcoolisées.

Les chercheurs ont couplé un signal visuel à la présence d’éthanol, de manière à ce que les rats s’attendent à recevoir de l’alcool chaque fois qu’ils voient le signal. Ainsi, au moment où on leur présentait le signal, les rats se rendaient à l’endroit précis où de l’alcool leur était donné. Cependant, après un certain temps, les rongeurs ont abandonné ce comportement pour plutôt se diriger vers le signal visuel et interagir avec celui-ci.

Ce phénomène avait lieu même si les rats ne gagnaient rien à jouer avec le signal, et qu’ils auraient, en fait, eu davantage intérêt à s’approcher de l’endroit où de l’alcool leur serait éventuellement donné.

Les chercheurs ont en outre remarqué que les rats étaient prêts à faire des efforts pour qu’on leur montre un signal visuel précédemment couplé à la présence d’alcool, et ce, même si l’on ne leur donnait pas d’alcool simultanément à la présentation du signal en question. Ces résultats donnent à penser qu’un signal prédictif peut devenir en soi désirable.

Mais, dans quelle mesure le comportement du rat peut-il aider à comprendre la dépendance chez l’humain?

« Une large part de nos comportements sont tributaires de mécanismes d’apprentissage fondamentaux qui sont présents chez d’autres espèces animales, explique Nadia Chaudhri. En reproduisant ces comportements chez le rat, nous pouvons mieux comprendre les facteurs qui régissent la manière dont ils sont acquis et entretenus chez l’humain. »

Selon la chercheuse, il est possible de se servir de modèles animaux pour découvrir des façons d’atténuer les comportements indésirables, comme la réponse aux signaux qui prédisent la consommation d’alcool.

« Ces connaissances peuvent ensuite être transposées en clinique, où nous pouvons mettre à l’épreuve des stratégies similaires chez l’humain », ajoute-t-elle.

« Les modèles murins peuvent également nous renseigner sur les mécanismes du cerveau qui ont une incidence importante sur le comportement. Ces recherches scientifiques fondamentales sont essentielles à la mise au point de traitements de maladies comme l’alcoolisme et les autres dépendances. »

La Pre Chaudhri présentera bientôt les résultats de cette étude, ainsi que ceux d’autres travaux connexes, à l’occasion du prochain symposium annuel de la Society for Quantitative Analyses of Behavior, qui aura lieu les 27 et 28 mai prochains, à Chicago.

Partenaires de recherche

Cette étude a bénéficié de subventions du National Institute on Alcohol Abuse and Alcoholism (institut national sur l’abus d’alcool et l’alcoolisme des États‑Unis), du Fonds de recherche du Québec – Santé et du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada.


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