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Communiqué de presse

Sous-estime-t-on les éducatrices et éducateurs de la petite enfance?

Une chercheuse de l’Université Concordia qui souhaite amener un changement de l’opinion publique à leur égard

Research by Sandra Chang-Kredl calls for a rethinking — and revaluing — of the work being done by child-care educators in order to generate social change. | Photo by Chaim Zvi (Flickr Creative Commons) Research by Sandra Chang-Kredl calls for a rethinking — and revaluing — of the work being done by child-care educators in order to generate social change. | Photo by Chaim Zvi (Flickr Creative Commons)

Montréal, le 15 septembre 2015 — Dans quelques semaines à peine auront lieu les élections fédérales. Or, les services à l’enfance font partie des principaux enjeux du scrutin. Bien que chaque parti ait sa propre idée quant à la meilleure manière de compenser les coûts associés au fait d’élever des enfants, personne ne s’intéresse à la façon dont nous percevons celles et ceux qui les éduquent et en prennent soin ni à la valeur que nous leur accordons.

Chercheuse à l’Université Concordia, Sandra Chang-Kredl veut changer la situation. Comme elle l’affirme dans un article publié récemment dans la revue Journal of Media & Cultural Studies : « Le débat porte en général sur les besoins des enfants, des parents et de la société, mais rarement sur ceux des éducateurs. »

Son étude incite à repenser – et à réévaluer – le travail accompli par les éducatrices et éducateurs de la petite enfance, afin de susciter un changement social.

Professeure adjointe au Département des sciences de l’éducation de Concordia, elle‑même ancienne éducatrice de la petite enfance, Mme Chang-Kredl explique qu’il existe, dans la société canadienne, une perception répandue selon laquelle les travailleurs du secteur de l’éducation à l’enfance forment une main-d’œuvre peu qualifiée, qui n’a besoin d’aucune formation sérieuse pouvant justifier une rémunération plus importante.

« Nous sommes en présence de deux problèmes, poursuit-elle. D’abord, notre société n’accorde pas vraiment de valeur au travail des enseignants en général – pour se convaincre, il suffit de regarder la situation des professeurs dans les écoles publiques québécoises. Ce dénigrement s’amplifie dans le cas des travailleurs de la petite enfance. Il existe une perception erronée de l’éducation en tant que moyen de transmission du savoir – si vous pouvez lire l’anglais, vous pouvez enseigner la langue; si vous êtes capable d’attacher vos lacets, vous pouvez enseigner la maternelle. Toutefois, la fonction d’éducateur exige beaucoup plus qu’une bonne connaissance de la matière. »

Puis, il y a la représentation des sexes au sein de la profession. En effet, 98 pour cent des éducateurs de la petite enfance sont des éducatrices. « Nous confondons la tâche de l’éducatrice et celui de la mère, affirme la chercheuse. Pourtant, élever ses propres enfants est considéré comme une occupation honorable, et le débat entourant les soins à accorder aux enfants est centré sur le soutien qu’il faut offrir aux parents. Or, nous croyons sans la moindre gêne aucune que les femmes qui prennent soin des enfants à l’extérieur du domicile parental ne devraient pas s’attendre à jouir d’un statut professionnel ou à recevoir une rémunération adéquate. » Pourquoi?

« Il est difficile de donner directement un sens à la situation, explique la Pre Chang-Kredl. Certaines croyances sociales ne peuvent être abordées que de façon indirecte, notamment par le biais du récit populaire. » À titre d’exemple, la chercheuse mentionne le film pour enfants Coraline. Petite fille de dix ans, Coraline a une mère. Or, il se trouve qu’elle a aussi une Autre Mère. Sa mère est ennuyeuse et toujours fatiguée; son Autre Mère est charmante et attentionnée. 

« Jusqu’ici, rien d’inquiétant. Toutefois, Autre Mère s’attend à recevoir quelque chose en retour… La situation tourne vite au cauchemar quand Autre Mère, insatisfaite, se transforme en monstre. Le récit repose sur le désir du spectateur de voir Autre Mère anéantie pour que les choses reviennent à “ce qu’elles devraient être”. »

« C’est une bonne histoire, ajoute la Pre Chang‑Kredl, sauf qu’elle vient renforcer une condition qui joue contre les femmes qui prennent soin des enfants : on s’attend à ce qu’elles le fassent par amour et altruisme, en s’oubliant totalement. »

« Nous devons construire une nouvelle identité pour les éducatrices et éducateurs de la petite enfance », insiste-t-elle. D’ailleurs, l’Université Concordia s’y applique déjà dans le cadre de son baccalauréat en éducation préscolaire et en enseignement primaire, programme d’études axé sur une carrière professionnelle auprès des enfants les plus jeunes. « De tels programmes doivent devenir la norme chez les éducatrices et éducateurs de la petite enfance, affirme Sandra Chang‑Kredl. De meilleures normes d’enseignement pourraient signifier une rémunération plus élevée et un meilleur statut social pour des milliers de gens – des femmes pour la plupart – qui travaillent dans le milieu de l’éducation à l’enfance au Canada. »

Mais pour en faire une norme, la chercheuse soutient que nous devons également être conscients de notre participation à la sous-estimation des femmes qui assument des fonctions à vocation sociale.


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